Attouchements, frottements, exhibition : 267 000 victimes dans les transports en commun

Publié le Mercredi 20 Décembre 2017
Charlotte Arce
Par Charlotte Arce Journaliste
Journaliste en charge des rubriques Société et Work
Attouchements, frottements, exhibition : le cauchemar des utilisatrices des transports en commun
Attouchements, frottements, exhibition : le cauchemar des utilisatrices des transports en commun
Selon une enquête menée par l'Observatoire de la délinquance, au moins 267 000 personnes ont été victimes d'atteintes sexuelles dans les transports en commun entre 2014 et 2015. Une "estimation basse" qui permet enfin de mesurer l'ampleur d'un phénomène touchant majoritairement des femmes.
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Phénomène de masse, visible et insupportable pour quiconque emprunte chaque jour le train ou le métro pour se rendre au travail ou pour ses loisirs, le harcèlement sexiste et sexuel dans les transports en commun n'avait jusqu'ici jamais été quantifié. C'est désormais chose faite grâce à l'enquête menée par l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), et dont les résultats ont été dévoilés ce mardi 19 décembre.

Réalisée entre 2014 et 2015, l'étude indique que plus de 267 000 personnes ont été victimes d'atteintes sexuelles dans les transports en commun, dont 44% "ayant subi plusieurs actes de même nature". Cela comprend des baisers forcés ou des caresses (pour près de 160 000 victimes), ainsi que des exhibitions (110 000 personnes concernées). L'enquête met aussi en lumière de nouvelles pratiques de la part des harceleurs et agresseurs, qui restent marginales mais pourraient prendre de l'ampleur : l'upskirting, qui consiste à prendre des photos sous les jupes des femmes, ou encore "l'exposition à des images obscènes". Surtout, note l'enquête, les atteintes sexuelles ne se limitent pas à du harcèlement, mais relèvent bien de l'agression dans de nombreux cas : 160 000 personnes interrogées disent ainsi avoir subi des attouchements, des rapports sexuels ou des tentatives de rapports sexuels non désirés. Il s'agit sans doute possible de viols ou de tentatives de viol, qui sont commis dans la plupart des cas au sein même de la rame en mouvement (61%). Dans 26% des cas, l'agression survient dans la gare ou une station de métro.

Les jeunes femmes d'Île-de-France en première ligne

Évidemment, parmi les cibles des frotteurs et agresseurs, on retrouve principalement des femmes : 85% des victimes selon l'ONDRP. "Les jeunes femmes sont nettement plus exposées que leurs aînées. Le taux de victimation des métropolitaines ayant de 18 à 21 ans atteint 2,3%. Jusqu'à 30 ans, le taux est relativement stable. Après 30 ans, il diminue régulièrement pour atteindre 0,3% pour les femmes de plus de 45 ans".
"Pour deux tiers d'entre elles, le caractère sexuel de l'agression se manifeste par un contact physique avec l'auteur (...) Quant aux hommes, minoritaires parmi les victimes (15 %), ils ont la particularité d'être essentiellement exposés à des cas d'exhibition (52 % des atteintes à leur encontre)", détaille l'enquête, citée par Le Figaro.

Les jeunes utilisatrices du réseau de transports d'Île-de-France sont les principales concernées par les atteintes sexuelles : 7,6% des jeunes femmes franciliennes âgées de 18 à 21 ans ont reconnu avoir été victimes de harcèlement ou d'agression dans les transports. 13% des victimes étaient mineures au moment des faits. Ces atteintes concernent encore 4 à 5% des femmes âgées de moins de 35 ans, puis diminue avec l'âge. Ainsi, 1% des femmes de 45 ans et plus ont été victimes d'atteintes sexuelles durant la période concernée.

Aussi alarmants que soient ces chiffres, il faut bien avoir conscience, insiste l'ONDRP, qu'il s'agit d'une "estimation basse". Ils sont en effet basés sur les données recensées par l'enquête "Cadre de vie et sécurité", ainsi que par celles de la Gestion informatisée du renseignement opérationnel statistique (Giros) de la sous-direction régionale de la police des transports de la préfecture de police de Paris. Impossible, donc, de recenser les victimes d'attouchements, d'agression ou d'exhibitionnisme qui n'ont pas porté plainte.