Kevin Parent : Oui, je crois que j’avais certaines dispositions à me tourner vers la comédie. Je ne me suis jamais imaginé acteur. J’aime bien appeler mes potes, me faire passer pour quelqu’un du gouvernement ou un prêtre qui réclame la dîme, mais c’est plus pour faire le con qu’autre chose! Ça fait vingt ans que je fais de la scène, que je palpe le public, le son de ma guitare, de ma voix. Je suis un artiste très sonore, le visuel importe moins, au niveau de mon look, de mes clips, de ma façon de vendre ma musique. En revanche, là où mon art rejoint le cinéma, c’est dans cette sensibilité que j’aime développer avec mon public. C’est ce qui a créé un pont avec Jean-Marc et son projet de film.
KP : C’est une agence de casting qui m’a contacté, alors que j’étais en train de couper mon bois de chauffage, en bon Gaspésien ! Elle m’a donné un résumé du scénario, une description du personnage, et la musique de « Café de Flore ». Il y avait 48 minutes de bande-son, du Pink Floyd, du Sigur Rós, et les quatre versions de la chanson Café de Flore (composées par Matthew Herbert). Tout ce qui était écrit me semblait accessible. L’audition s’est bien passée, et Jean-Marc m’a conseillé de réécouter cette musique comme un mantra, une prière, qui me guiderait pour composer le rôle.
KP : Je le trouvais dur au début, arrogant. Quand j’ai abordé le rôle, j’avais réglé certains problèmes liés à l’alcool, à la drogue, dans ma vie personnelle, alors qu’Antoine reste fragile sur ce terrain-là. Souvent, il pète les plombs, avec sa fille par exemple. Je connais la violence, j’ai été un peu délinquant plus jeune. Quand tu passes ta vie à gueuler dans un micro, tu connais cette énergie de fond. Mais quand elle n’est pas canalisée, quand elle est obstruée par l’alcool ou la drogue, elle peut rejaillir en violence. C’est ce qui se passe avec Antoine, qui est pris dans une souricière. Il respecte la mère de ses enfants, mais pour une raison cosmique, karmique, il retombe en amour avec cette nouvelle femme. Et ce qui l’emmerde, c’est le jugement de son entourage, de son père, de sa fille. Mais c’est un mec bien.
KP : Totalement, mais plus qu’écouter la musique, la jouer! Mais là où je pense avoir échoué avec mon fils, qui a bientôt 19 ans, c’est dans la transmission de la musicalité de la nature, celle encore plus pure de l’eau, des vibrations terrestres. Je suis un féroce défenseur de la Gaspésie, et j’aimerais bien que mon fils se déconnecte un peu d’internet et sorte de sa chambre! (rires) Je suis une brute, moi! Je viens d’un lieu où les sens primitifs importent plus que les mots. Bien sûr, il faut embrasser son potentiel, intellectuel, artistique, mais il faut aussi vivre. Sinon, on se ment un peu. J’aime jouer, mais jouer vrai.
KP : Je crois que si on est en contact avec soi-même, et si on est prédisposé à aimer la vie, si on veut vivre et laisser vivre, alors oui on peut aimer plusieurs personnes, à différents moments de son existence. Mais j’admire ceux qui ont trouvé des compagnons de route ouverts à cette philosophie, qui ont pu évoluer ensemble, se renouveler et briser les chaînes.
Entretien réalisé par Élodie Vergelati
Crédit photo : Sébastien Raymond
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