Mannequin, journaliste chez Elle pendant 10 ans, puis consultante pour Tom Ford, Carine Roitfeld est débauchée par Condé Nast et devient rédactrice en chef de Vogue Paris en 2001. Le magazine enchaîne dès lors les séances photo provocantes avec la complicité de Mario Testino : les mannequins sont rachitiques, les poses à la limite du vulgaire. Carine Roitfeld vient de créer le porno chic. Une appellation à laquelle elle préfère d’ailleurs celle d’érotique-chic : « C'est un peu comme être un chanteur, à qui le public donne un surnom : je n'ai pas choisi ce titre, il a été choisi pour moi », dira-t-elle plus tard. Le style choque mais fait vite fureur, les ventes du magazine augmentent de 25% et Carine Roitfeld devient une icône. Ses jupes crayons et ses chemisiers de bourgeoise new age inspirent les plus grands (elle est la muse de Tom Ford et de Riccardo Tisci), son célèbre smoky eye et ses sourcils broussailleux aussi. Carine Roitfeld lance les tendances et Vogue devient incontournable.
Seulement, il n’y a pas que les photos provoc' (on se souviendra notamment de la célèbre pub Gucci où une mannequin arbore un sexe rasé en forme de G…) qui choquent. Les scandales affleurent et Carine Roitfeld commence à en hérisser plus d’un. Elle est entre autres accusée d'avoir fait du consulting auprès de grandes marques de luxe (ce qu’elle n’a cessé de démentir), aurait prêté la totalité d'une pré-collection Balenciaga à Max Mara, qui ne se serait pas privé de s’en inspirer. Cette trahison aurait d’ailleurs valu à la papesse d’être bannie des front row Balenciaga. S’ajoute à ça l'épisode de l'ANDAM 2010. Abusant de son statut de présidente du jury de ce concours visant à promouvoir les créateurs émergents, Carine Roitfeld aurait fait en sorte d’assurer la victoire au styliste turc Hakaan Yildirim. La raison de ce favoritisme ? Le directeur artistique de la griffe était Mert Alas, photographe chouchou de Vogue Paris…
Dernier esclandre de la période Vogue : une série de photos shootées pour un numéro spécial enfants et orchestrée par Carine Roitfeld, mettant en scène des fillettes de dix ans dont la jeune Thylane Loubry maquillées, couvertes de bijoux et stilettos aux pieds. Moue boudeuse, poses lascives… on n’est pas loin des photos très contestées de l’artiste Irina Ionesco. « Tu pousses le bouchon un peu trop loin », lui aurait dit Bernard Arnault, PDG de LVMH à la vue des clichés. Le scandale de trop ? Carine Roitfeld quitte en tout cas Vogue Paris en décembre 2011.
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À 59 ans, la papesse désire officiellement se livrer à des projets plus personnels. En octobre 2011, elle avait déjà publié Irreverent, un livre mêlant des photos personnelles et les clichés les plus emblématiques de sa carrière. Elle signe cette fois avec Karl Lagerfeld un livre et une expo sur l’iconique petite veste noire de Chanel, collabore avec MAC pour créer une palette de maquillage… Surtout, elle devient « Global Fashion Editor » pour l’ensemble des éditions du magazine Harper’s Bazaar et lance son CR Fashion Book, une publication semestrielle mi-livre mi-magazine. C’est cette renaissance éditoriale que le réalisateur Fabien Constant a choisi de montrer dans Mademoiselle C. Un reportage dans la même veine que le fameux The September Issue (un docu sur la réalisation du numéro de septembre du Vogue US). Entre un comité de rédaction et deux shootings, on y voit tout de même Karl Lagerfeld balader en poussette la petite-fille de Carine Roitfeld… Bande-annonce.
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