Une telle homonymie aurait pu faire taire à jamais les prétentions artistiques de ce Steve Mc Queen (II). Le réalisateur anglais Steve Rodnay Mc Queen, né en 1969, soit un peu plus de dix ans avant la mort de l'acteur américain, s'est fait remarquer dans le monde de l'art contemporain dès la fin de ses études artistiques à Londres, grâce à des vidéos expérimentales. Il obtient en 1999 le Turner Prize, pour Deadpan, une séquence inspirée d'un film de Buster Keaton. Á partir de là, chaque oeuvre de Steve McQueen trouvera un écho favorable, confirmant à chaque fois un peu plus son talent.
Depuis quelques années, les films sur la période esclavagiste aux États-Unis se succèdent, entre The Help (« La Couleur des sentiments ») ou Django Unchained de Quentin Tarantino, il semble que les réalisateurs aient envie de régler des comptes avec l'Histoire. Le scénariste John Ridley s'est appuyé sur l'histoire vraie de Solomon Northup, auteur de l'autobiographie : 12 ans d'esclavage, compte-rendu poignant des douze années de captivité d'un noir né libre dans l'État de New York. Le livre publié quelques temps après sa remise en liberté, en 1853, fut un best-seller, Northup devient une figure de l'abolitionnisme, avant de disparaître à nouveau autour de 1857. On ne sut jamais si l'homme avait été tué ou de nouveau enlevé...
>>"12 Years a Slave" étudié dans les écoles américaines <<
Inutile de préciser que ce film fort comporte des scènes parfois insoutenables de cruauté. Steve McQueen va très loin dans ce qui semble être le thème central de ses films : le quête de la dignité d'un homme. Dans Hunger, film pour lequel il a obtenu la Caméra d'or au Festival de Cannes en 2008 dans la section « Un certain regard », il retraçait la grève de la faim des membres de l'IRA en 1981, visant à faire reconnaître la teneur politique de leur combat, et la mort du leader du mouvement, Bobby Sands. Sur un tout autre registre mais aussi dérangeant, il explore dans Shame, sorti en 2011, les affres de l'addiction sexuelle, sous un angle sorti des clichés et de la stigmatisation.
Michael Fassbender, acteur fétiche de Steve McQueen puisqu'il était le héros de ses deux premiers long-métrages (Hunger et Shame), a gagné grâce à lui son aura de comédien magnétique, capable d'émouvoir et de terroriser dans Shame, rôle pour lequel il est distingué au Festival de Venise avec la Coupe Volpi pour la meilleure interprétation masculine. On l'a vu par ailleurs dans des films d'action/science-fiction comme X-Men ou Prometheus, il fait partie du casting du prochain épisode X-Men : Days of Future Past de Bryan Singer, mais également du prochain Terrence Malick, sobrement intitulé Untitled Terrence Malick Project. Dans 12 Years a Slave, il joue le rôle d'Edwin Epps, un propriétaire de plantation fanatique et cruel, qui inflige les pires souffrance psychologiques et physiques à Solomon et aux esclaves de son domaine.
Ce nom difficile à prononcer est celui de l'acteur principal du film. Britannique issu d'une famille nigériane, Chiwetel a fait ses classes à la London Academy of Music and Dramatic Art. Il est embauché en 1997 sur le tournage du film Amistad de Steven Spielberg, une autre chronique sur l'esclavage dans laquelle on retrouvait Morgan Freeman et Matthew McConaughey. Il a obtenu de nombreuses récompenses notamment pour son rôle dans Dirty Pretty Things de Stephen Frears (2002) et dans Talk to Me de Kasi Lemmons. Il semble que dans 12 Years a Slave l'étendue de son talent ne fasse plus aucun doute : Chiwetel Ejiofor a obtenu 15 récompenses en tant que meilleur acteur pour le rôle de Solomon Northup, et 4 nominations dont une pour l'Oscar du meilleur acteur, finalement remporté par Matthew Mc Conaughey pour Dallas Buyers Club. En revanche sa partenaire à l'écran, Lupita Nyong'O, est repartie avec l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle.