" M. Grey va vous recevoir dans un instant ". Elles sont des millions de femmes à avoir rêvé, comme la jeune et innocente Anastasia Steele, de franchir les portes du bureau du mystérieux milliardaire. Des millions de lectrices à avoir été émoustillées par le magnétique Christian et ses relations sado-maso avec la douce étudiante. Quatre ans après la sortie du bouquin, le mommy porn de la Britannique E.L. James débarque sur les écrans, soutenu par une campagne marketing particulièrement affûtée et des légions de fans en transe.
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Alors que les rumeurs (bien orchestrées) annonçaient un scandale à la hauteur d'un Emmanuelle ou Histoire d'O en leur temps, les aventures érotico-scabreuses de Christian Grey et Anastasia Steele font l'effet d'un pétard mouillé. Un signe qui ne trompe pas : le film signé Sam Taylor-Johnson est interdit aux moins de... 12 ans. Libidineux, passez votre chemin, ce 50 Shades of Grey se révèle aussi aseptisé que le loft de son héros tiré à quatre épingles. Si l'on voit pointer les tétons d'Ana ici et là, pas l'ombre d'un sexe turgescent, d'un coït ou d'une quelconque sécrétion qui ferait tache.
Ici, la chaste Anastasia se mordille les lèvres pour signifier son trouble, suçote son crayon estampillé Grey (ô subtil symbole), rêvasse que son beau prince torturé vienne la sauver des gros dragueurs lourds et l'embarque dans son Audi blanche (ou son hélico rutilant). Toute ressemblance avec un certain Twilight n'est pas fortuite puisque 50 Shades est à l'origine une fanfiction inspirée de la romance simplette de Bella la lycéenne et Edward le vampire.
Comme ses deux modèles teen très lisses, Ana et Christian échangent plus de mièvreries que de fluides corporels, sont séparés par un lourd secret bien vite défloré et mettent près de la moitié du film avant d'oser s'effleurer. Et quand vient enfin le moment de conclure, c'est enveloppés dans des draps de satin, avec force effets stylistiques, musique sirupeuse et gros plans sur le visage extatique de l'héroïne. Sans oublier quelques plans furtifs sur des fragments de fesses, histoire d'ajouter une pincée de soufre à l'eau de rose. C'est joli, léché et parfaitement inoffensif.
Christian Grey promettait de " baiser sauvagement " Anastasia ? Pourtant, il semblerait qu'il ait fait l'impasse sur le stupre au petit déjeuner. C'est à peine si l'on devine une goutte de sueur perler sur son front d'apollon après l'effort. Et si l'on entraperçoit ses fouets et cordelettes qui viennent égayer sa " salle de jeux " capitonnée, son initiation s'apparente plus à un petit guide (très soft) du sex-toy pour les nuls qu'à L'empire des Sens. Alors que retenir de cette romcom gentiment cucul et policée ? Jamie Dornan, regard de fauve et abdos ciselés, incontestablement à la hauteur du fantasme collectif. C'est toujours ça de pris.
La bande-annonce de 50 Shades of Grey :