Robert Neuburger est psychiatre, psychanalyste, thérapeute de couple, et auteur de « Première séance » aux éditions Payot.
Robert Neuburger : Non, pas vraiment. Cela s’est répandu, vulgarisé, banalisé. Les gens n’ont plus honte de dire qu’ils y vont. Pourtant, les premiers couples que j’ai reçus et qui s’étaient rencontrés sur Internet, je les ai regardés de manière bizarre, je pensais que cela manquait de romantisme. De plus en plus d’individus se connectent à ces sites par effet de curiosité et de rêve. Ils n’y vont pas forcément pour rencontrer quelqu’un. Beaucoup s’en servent pour rêver et d’autres cherchent vraiment à faire des rencontres.
R.N. : Cela apporte quelque chose de différent que les vraies rencontres, de complémentaire. Auparavant la rencontre physique précédait la rencontre intellectuelle. Là c’est le contraire. On retrouve ainsi un modèle plus classique de relation. En fait, ce mode de relations ressemble aux correspondances du XIXème siècle (cf Kafka). J’ai ainsi des patientes qui entretiennent des correspondances enflammées sans intention de se voir. Mais quand même dès qu’il y a une rencontre réelle, là il y a un choc. Cela reste deux étrangers qui ont tchatté pendant des heures. L’irruption des corps change tout.
R.N. : J’ai une clientèle majoritairement féminine, et certaines sont effectivement inscrites sur des sites de rencontres. Il y a les célibataires, et il y a les autres. Ce sont souvent des femmes qui ne sont pas satisfaites en couple car leur mari n’est devenu rien d’autre qu’un parent avec des soucis. Elles trouvent ainsi un complément qui ne met pas leur couple en danger. Par exemple, J’ai une patiente qui y va dès qu’elle a une minute, mais en fait elle n’y fait rien. De plus, beaucoup de couples viennent me voir parce qu’ils ont découvert que l’autre fréquentait des sites de rencontres. C’est une raison fréquente de me consulter.
Propos recueillis par Alix Foriel
Crédit Photo : Philippe Matsas-Opale- Editions Payot & Rivages
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