Camille Bedin, 26 ans, est étudiante. Elle a suivi des études à Sciences Po et à l’Essec, et cofondé deux associations œuvrant pour les jeunes des quartiers. Secrétaire nationale de l’UMP en charge de l’égalité des chances, elle vient de publier « Pourquoi les banlieues sont de droite » aux éditions Plon.
Camille Bedin : Cela fait 5 ans que je travaille dans les quartiers. Grâce aux deux associations que j’ai fondées, je travaille au quotidien avec des jeunes, je les coache, je les aide à préparer leur bac et leurs études supérieures. Or, tout ce que l’on raconte sur les banlieues est faux : les valeurs portées par ces jeunes sont des valeurs avant tout libérales, et de droite.
C.B. : Il s’agit tout d’abord de la liberté, du travail, du mérite, du fait de gagner son argent, et la réussite individuelle. Dans les quartiers, un jeune sur deux veut créer sa boîte ! Leur ennemi à eux, ce n’est pas le monde de la finance, comme François Hollande. Et ils sont contre le plafonnement des salaires, car leur rêve est bien de gagner le plus d’argent possible. De plus, il y a un rejet total de l’assistanat. Ils ne croient plus en l’État, seulement en eux-mêmes. Les autres valeurs de ces banlieues, ce sont la transmission familiale. Quand la gauche veut faire table rase du passé, eux veulent faire la fierté de leurs parents. Certes, le titre de mon livre est provocateur mais il décrit une vraie réalité.
C.B. : C’est que la droite n’ose pas aborder ces questions de front, car elle ne se sent pas légitime sur les thèmes de l’égalité des chances et de l’éducation. Elle a la conviction que comme les quartiers votent à gauche, c’est perdu d’avance. À gauche en revanche, ils sont persuadés que c’est acquis donc ils délaissent les quartiers, et font des propositions qui ne sont pas en adéquation avec leurs valeurs. Par exemple, la dépénalisation du cannabis est contraire aux attentes des familles des quartiers qui ont plutôt besoin de repères.
C.B. : Non, beaucoup de choses ont été faites en 5 ans. Au final, Nicolas Sarkozy n’a pas pris les banlieues comme un territoire à part de la République, sur lequel il faudrait toujours plus de moyens. Il a mené des réformes transversales (éducation, emploi, rénovation urbaine). Les internats d’excellence, le soutien scolaire gratuit le soir ou pendant les vacances, les Cordées de la réussite, les 30% de boursiers dans les prépas, l’apprentissage, et même le statut d’autoentrepreneur fonctionnent très bien dans les quartiers.
C.B. : je pense que l’État auquel on se réfère en permanence n’est pas la solution. La réussite passera uniquement par les gens : il faut les responsabiliser, sinon on n’arrivera à rien.
C.B. : J’ai rencontré un jeune entrepreneur qui a monté sa boîte dans le 93 et qui m’a demandé de coacher un lycéen pour entrer à Sciences Po. Mais il m’a demandé de ne pas le faire gratuitement pour ne pas qu’il se sente assisté. Le donnant-donnant, c’est donc devenu le principe de mon association : nous coachons des jeunes qui donnent quelque chose en échange (des cours de boxe, de danse,…). C’est ainsi que je me suis rendu compte que les talents de la France étaient là.
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