Léonora Miano est née dans un milieu aisé en 1973, à Douala, au Cameroun, où elle passe son enfance et son adolescence, avant de venir en France en 1991. Elle étudie alors les Lettres anglo-américaines, d'abord à Valenciennes puis à Nanterre, et a une fille à 22 ans. La romancière est naturalisée en 2008. Elle vit actuellement à Paris.
Léonora Miano écrit ses premiers poèmes à huit ans, son premier roman à l’adolescence. Depuis ses 16 ans, elle écrit un roman par an. Pourtant ce n’est qu’à trente ans qu’elle envoie son premier manuscrit à une maison d’édition : « Le temps d'avoir le sentiment de posséder une écriture personnelle, qui contienne son tempérament et qui restitue sa musique intérieure. »
En 2009, dans Les Aubes écarlates (Éd. Plon), elle évoquait déjà les « disparus » de la traite négrière. Avec La saison de l'ombre elle donne la parole à ceux dont on ne dit jamais rien, un clan perdu dans les terres de l’Afrique sub-saharienne. Les mères, les promises, les fiancés, les frères à qui on a arraché quelqu’un.
Xénophobe et sexiste la France ? L’année dernière, Léonora Miano évoquait pour Slate Afrique les clichés qui collent durablement à la peau des noirs, des femmes, et des femmes noires surtout. « On me demande parfois si Léonora est mon vrai nom. Si ce n’est pas Fatou, on pense que ce n’est pas vrai. Je réponds que mes parents s’appellent Jacques et Chantal, et que nous avons quand même été un peu colonisés…» Elle parlait aussi des questions plus que déplacées qu’on lui pose parfois : « Quand les gens m’aiment bien, ils me demandent si je couche avec un blanc ou pas. Si votre amoureux est noir, alors vous n’êtes pas assez assimilée. »
L’auteure a aussi écrit un répertoire de chansons en français, intitulé Sankofa Cry, dans lequel elle explore les émotions des premiers subsahariens déportés pendant la traite transatlatique et interprète elle-même ses chansons. L’objectif ? Restituer leur humanité aux déportés et inclure l'auditeur, d'où qu'il vienne, dans un moment particulier de l'histoire humaine.
Parmi les candidat au prix Femima, que Léonora Miano a obtenu ce mercredi 6 novembre, il y avait Charif Majdalani pour Le Dernier seigneur de Marsad, Céline Minard pour Faillir être flingué, Laurent Seksik pour Le cas Eduard Einstein et… Pierre Lemaitre pour Au revoir là-haut distingué lundi par le prix Goncourt.
« Si leurs fils ne sont jamais retrouvés, si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé, on ne racontera pas le chagrin de ces mères. La communauté oubliera les dix jeunes initiés, les deux hommes d'âge mûr, évaporés dans l'air au cours du grand incendie. Du feu lui-même, on ne dira plus rien. Qui goûte le souvenir des défaites ? »
Nous sommes en Afrique sub-saharienne, quelque part à l'intérieur des terres, dans le clan Mulungo. Les fils aînés ont disparu, leurs mères sont regroupées à l'écart. Quel malheur vient de s'abattre sur le village ? Où sont les garçons ? Au cours d'une quête initiatique et périlleuse, les émissaire du clan, le chef Mukano, et trois mères courageuses, vont comprendre que leurs voisins, les BWele, les ont capturés et vendus aux étrangers venus du Nord par les eaux.
Dans ce roman puissant, Léonora Miano revient sur la traite négrière pour faire entendre la voix de celles et ceux à qui elle a volé un être cher. L'histoire de l'Afrique sub-saharienne s'y drape dans une prose magnifique et mystérieuse, imprégnée du mysticisme, de croyances, et de « l'obligation d'inventer pour survivre ».
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