Libération s’offre un joli coup de pub mais aussi un lynchage en bonne et due forme sur les réseaux sociaux avec une Une consacrée ce lundi matin à l’homme d’affaires Bernard Arnault. Alors que l’information a fait grand bruit dimanche concernant la volonté de celui-ci de demander la nationalité belge, une annonce qui sonne comme la promesse d’une évasion fiscale imminente pour échapper à la taxe à 75% sur les hauts revenus. En tant que quatrième fortune mondiale et première fortune de France, et avec 10,7 millions de revenus en 2011, l’homme d’affaires originaire du Nord a en effet tout à perdre avec cette mesure. En réaction, Libé détourne la phrase désormais mythique de Nicolas Sarkozy au salon de l’Agriculture : « Casse-toi, pauvre con ! » en « Casse-toi, riche con ». Le milliardaire ne manquera pas de se sentir insulté, puisqu’il apparaît en photo armé de sa valise.
Et en effet il s’agit bel et bien d’insulte, et précisément d’« injure publique », un délit défini par la loi sur la Liberté de la Presse du 29 juillet 1881 et passible de 12 000 euros d’amende : (article 29) « Toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est considérée comme injure». La particularité de l’injure publique est qu’elle est proférée publiquement et qu’elle ne repose sur aucun fait. Autrement dit, même si l’on venait à prouver qu’untel est un incapable, un idiot ou un « con », cela n’autoriserait pas pour autant une entreprise de presse à le traiter d’incapable, d’idiot ou de con en première page…
Libé semble avoir pris goût au bon gros bad buzz autour de ses Unes assassines. Une première polémique avait éclaté le 3 janvier dernier, deux mois avant le début de la campagne officielle pour la présidentielle. La lettre de François Hollande aux Français est reproduite mot pour mot en Une, lançant implicitement la campagne de Libération pour son champion. Accusé de s’aligner au niveau du tract politique par l’UMP, le directeur de la rédaction Nicolas Demorand se justifie alors par la volonté de redonner sa place et sa puissance à la « parole politique ». Nouveau tollé le 25 avril, quand Libération titre sur une phrase attribuée à Nicolas Sarkozy : « Le Pen est compatible avec la République », sur fond de photo en noir et blanc créant insidieusement une atmosphère année 40 qui a choqué.
Ici, la provocation semble plutôt gratuite et pour le moins racoleuse, puisque l’article correspondant précise bien que Bernard Arnault a assuré qu’il ne demandait pas la double nationalité pour des raisons fiscales, promettant même de « rester fiscalement domicilié en France », et de remplir, « comme tous les Français, l’ensemble de [ses] obligations fiscales. » Et qu’on le croie ou non, le patron le plus riche de France n’est pas encore parti...
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