Bruno Roger-Petit : Je ne pense pas. Le sport est devenu un phénomène de niche. Il est moins généraliste qu'avant, ce qui pousse les chaînes à proposer de plus en plus d’événements payants. Une chaîne généraliste n’achètera jamais un évènement féminin. En revanche, les initiatives de la TNT sont intéressantes. Direct 8, devenue D8, a fait le pari de diffuser du football féminin. Un pari réussi au vu des audiences de 900 000/1 million de téléspectateurs par match. Pourtant, on peut penser que le succès est relatif parce qu'il n’attire pas un public de masse, mais en fait, les chaînes plus grand public ne sont pas prêtes à investir davantage en raison de la chute des audiences dans ce domaine.
De plus, même si le gouvernement impose une politique volontariste de diffusion à grande échelle d'événements sportifs féminins, les chaînes généralistes se rebelleront. Y compris le service public. Parce que c’est aberrant d’un point de vue économique et parce que cette façon de faire pourrait même être contre-productive. Si un grand événement de sport féminin est diffusé et qu'il fait un flop, l’image du sport diffusé en prendra un coup.
B. R.-P. : C’est vrai qu'en France, si une fille a envie de jouer au foot, elle essaiera de rentrer à Lyon où elle sait que les conditions sont réunies pour réussir. De plus, la médiatisation permet de donner une bonne image de son club, des moyens mis en place pour obtenir des résultats. Après, Jean-Michel Aulas a toujours parié sur son équipe de foot féminine et en a toujours fait la promotion. C’est l’exemple parfait du phénomène de niche.
Néanmoins, je pense que malgré cet exemple de réussite, le mouvement à enclencher pour améliorer la médiatisation du sport féminin va prendre du temps, peut-être une ou deux générations. En effet, le sport reste majoritairement une affaire d’hommes, c’est quand même très rare une femme qui lit l'Équipe. Mais le sport, quand il est porté par des héros, ou dans ce cas, des héroïnes, dont la médiatisation va crescendo, suscite des vocations.
B. R.-P. : Elle a raison. Aujourd'hui, le corps du sportif de haut niveau est devenu un objet qui fait vendre. Et donc, ces événements sont un moyen de médiatiser un sport qu'il soit féminin ou masculin. Regardez le succès du calendrier des Dieux du Stade. Ou autre exemple, mon fils de sept ans adore le foot mais il est fan de Cristiano Ronaldo, pas de Lionel Messi. Parce qu'il met du gel dans ses cheveux, qu'il fait attention à son apparence. Et qu'il a du succès dans les médias avec les filles notamment. Le corps-objet du sportif de haut niveau, c’est discutable certes au point de vue éthique, mais c’est une réalité qu'il faut prendre en compte aujourd'hui.
B. R.-P. : Oui, j’aime bien. J’ai longtemps été dubitatif et puis, je me suis pris au jeu. Parce que finalement, la tactique est la même, le but aussi et puis le jeu transcende les représentations sexuelles. Ici, je parle du foot mais j’ai également suivi les équipes féminines de handball et de basket pendant les JO. Et je préfère le tennis féminin depuis bien longtemps au tennis masculin. C’est un des sports où il y a une médiatisation ancienne qui a permis à chaque catégorie de fidéliser son public. L’arrivée de l'Équipe HD sur la TNT devrait permettre à d’autres sports féminins de trouver leurs fans.
Crédit photo : FFT
Le sport féminin va-t-il enfin passer à la télé ?
A quelle heure faut-il faire du sport ?
Audiences TV : Le JT de TF1 détrôné par France 2 pour la 1ère fois en 14 ans
Football féminin français : les moins de 17 ans championnes du monde