Graphologie, tarot de Marseille, jeux infantilisants, astrologie, morphopsychologie, mais aussi recours à des officines de surveillance… Autant de pratiques douteuses qui sont pourtant utilisées par certains recruteurs et entreprises, nous explique le sociologue et président de l’Observatoire des discriminations Jean-François Amadieu dans son dernier ouvrage DRH : le livre noir (Éd. du Seuil). Un ouvrage qui n’est pas un réquisitoire, mais qui pointe les dérives du management dans un système global qui encourage le recours à des critères discriminants. Dernière grande mode dans ces pratiques « alternatives », la méthode « intuitive », appelée « remote viewing », qui consiste donc à se fier essentiellement à son intuition, à un pressentiment ou au feeling, pour trouver le « bon » candidat. Des méthodes peu rationnelles qui viennent s’ajouter à de nombreux critères discriminants tels que l’âge, le nom, l’adresse, l’apparence physique et, bien entendu, le réseau social dont dispose le candidat selon ses origines, ses études, etc. « La compétition est sérieusement faussée, explique Jean-François Amadieu, car dans 70% des cas, le candidat finalement recruté n’est pas un inconnu, qu’il ait été stagiaire ou pistonné, par exemple ». Et au final la tension est telle sur le marché de l’emploi que beaucoup trichent et truquent leur CV, pénalisant de facto ceux qui veulent rester honnêtes sur leurs diplômes, leurs expériences etc. Quant aux tests de personnalité, « entre 90 et 100% de ceux qui les réussissent le mieux sont des tricheurs, qui savent mentir sur leurs qualités ». Un trait de caractère qui ne constitue pas, par ailleurs, un gage de performance. Au contraire : « les menteurs ne sont pas aussi performants que prévu », souligne le sociologue. En revanche, ceux qui ont répondu honnêtement « révèlent une personnalité qui peut réellement être source de performance ».
Les dérives, en matière de RH, ne se limitent pas au recrutement. Elles se poursuivent bien souvent dans le déroulement de carrière. À commencer par des écarts de salaires significatifs pour la même fonction, avec le même diplôme et les mêmes compétences. « Une personne surpayée dès le début conservera cet avantage longtemps, voire l’augmentera avec le temps », explique Jean-François Amadieu. Or en France, l’origine sociale d’un salarié a un effet direct sur le niveau de salaire auquel il est embauché. « Ainsi, à diplôme égal, un enfant de cadre sera recruté à un meilleur salaire (+17%) qu’un fils d’ouvrier ». Le réseau, là encore, fait la différence : amis et connaissances « bien placés » nous influencent « souterrainement » dans la négociation d’un salaire. Par la suite, les évolutions de carrières seront plus ou moins réussies selon le monitoring dont le salarié bénéficie… Un phénomène de « plafond de verre » bien connu des femmes, longtemps tenues à l’écart des réseaux masculins. Enfin, l’évaluation des performances, censée permettre de juger un salarié sur des critères objectifs, reste bien souvent « floue et injuste », laissant une part trop subjective à l’appréciateur… Autant de process qui pourraient être améliorés, à condition que les DRH puissent reprendre un certain pouvoir perdu au sein de l’entreprise, constate Jean-François Amadieu. Mais malgré la bonne volonté de certains, ils restent souvent « inaudibles » face aux autres directions de l’entreprise.
Entretien d'embauche : les 5 attitudes qui vous trahissent
Entretien d’embauche : 8 conseils pour adopter la bonne attitude face à un employeur
Entretien d'embauche : la bonne tenue, mode d'emploi
Entretiens : les questions-pièges des boîtes les plus désirables du monde
Top 10 des questions étranges posées lors d’entretiens d’embauche