Adelaïde Russell : Ce sont en général des femmes actives qui ont des profils très diplômées. Elles sont à la fois investies dans leur travail et dans leur vie familiale et font ce choix de se réorienter délibérément. Les collaboratrices qui partent à l’étranger pour prendre un poste sont encore peu nombreuses comparé aux femmes qui suivent leur conjoint. Ce qui les motive ? Des raisons personnelles : l’envie de changer de vie, le renouveau dans le couple, un meilleur niveau de vie… Elles pensent toutes beaucoup à leurs enfants dans cette aventure.
A.R : Une femme qui prend un poste à l’étranger va s’investir beaucoup dans son travail. Mais elle va aussi s’impliquer naturellement dans la vie familiale. Elle sera très soucieuse de la situation de son conjoint et l’aidera à trouver sa place au mieux dans ce nouvel environnement. Pour les hommes c’est un peu différent. Le cadre expatrié aura plus tendance à confier la sphère affective à sa famille, à sa femme plus particulièrement.
A.R : Chacun a un positionnement à prendre, le collaborateur homme ou femme comme le conjoint suiveur. Les niveaux de stress et de difficulté sont communs aux deux personnes. Simplement, celui qui travaille retrouve avec son nouveau poste un cadre, alors que le conjoint à la maison va devoir, lui, tout recréer. Chacun passe forcément par une crise identitaire. La femme qui suit son mari et met entre parenthèse sa vie professionnelle reste très préoccupée par cet aspect. Elle peut culpabiliser de ne plus travailler, ressentir un vide énorme, tout en étant angoissée de devoir s’occuper de sa famille. Il y a aussi le poids des préjugés sociaux, qui fait qu’un homme sera peut-être moins satisfait d’un investissement dans sa vie privée (même s’il est provisoire) et qu’il éprouvera le besoin de retravailler immédiatement. Ce n’est pas facile de trouver le juste équilibre. Mais l’expatriation est aussi l’occasion de resserrer les liens et de trouver des ressources au niveau de la famille. L’entente du couple compte énormément dans la réussite du projet.
A.R : L’expatriation est une formidable aventure vécue en famille. Mais tout n’y est pas rose. Il ne faut pas sous-estimer la difficulté de certaines situations. Les divorces sont très nombreux, ils aboutissent à des retours anticipés, et c’est l’échec. Se préparer, prendre le temps de réfléchir aux projets à mettre en place permet d’éviter de gros moments de déprime. Le conjoint doit s’informer sur ce qu’il peut en retirer de positif. En envoyant un collaborateur à l’étranger, les entreprises ne touchent pas seulement à la sphère professionnelle, mais aussi la sphère privée. Même si elles mettent en place des formations pour les expatriés, elles n’ont pas encore vraiment saisi l’intérêt de la préparation. C’est de la prévention et cela ne se calcule pas. Or, ces outils sont très importants pour éviter de tomber dans les pièges. Il peut s’agir de formations interculturelles, linguistiques ou encore psychologiques. Ce dernier aspect est souvent négligé alors qu’il est essentiel. Toute expatriation soulève des questions personnelles liées à l’identité. De nombreuses formations font ce travail très bien aujourd’hui, l’idéal étant l’accompagnement personnalisé avec un coach. Après, vous pouvez avoir accès à beaucoup d’informations sur Internet. Des réseaux, des forums sont entièrement dédiés à l’expatriation, de même que des livres.
Adelaïde Russell est co-rédactrice de l’étude « Panorama de l’expatriation au féminin : conjoints, collaboratrices » avec Expat Communications. Elle est l’auteure de guides pratiques : « L’enfant expatrié : Accompagner son enfant à travers les changements liés à l’expatriation », l'Harmattan. « Conjoint expatrié, Réussissez votre séjour à l’étranger », l'Harmattan, février 2011.
Adelaïde Russell
Crédit photo : Creatas
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