« Élite, subst. fém. : Minorité d’individus auxquels s’attache, dans une société donnée, à un moment donné, un prestige dû à des qualités naturelles (race, sang) ou à des qualités acquises (culture, mérites) ». On note d’abord que le mot est féminin. Si l’on devait citer les femmes appartenant à l’élite française aujourd’hui, on nommerait Simone Veil, Claudie Haigneré, Hélène Carrère d’Encausse… Dans le domaine de l’économie les prétendantes sont un peu plus difficiles à trouver : Christine Lagarde, Anne Lauvergeon, Clara Gaymard, Delphine Ernotte-Cunci… Et demain ?
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C’est la question posée par l’Institut Choiseul, cercle de recherche indépendant, qui publie avec Terrafemina le premier classement des 40 femmes qui sont appelées à devenir les leaders économiques de demain. Ce « Choiseul 40 féminin » a identifié des centaines de femmes à haut-potentiel, via les recommandations issues de la société civile, des élus, des fédérations et des entreprises, pour sélectionner la crème de cette génération. « En tant que think tank économique, nous sommes en dialogue permanent avec les dirigeants, en majorité des "seniors" de plus de 55 ans », explique Didier Lucas, Directeur général de l’Institut Choiseul, « pour renouveler nos débats, nous avons décidé de nous adresser également aux jeunes, à la génération juste en dessous, mais pour cela il fallait d’abord l’identifier ». D’où la naissance du Choiseul 100 en 2013 avec Le Figaro, dans lequel on comptait 33 femmes, et de sa déclinaison féminine en 2014.
Les PDG de demain
« Rendre visibles ces 40 femmes est une façon de les encourager, et d’en motiver d’autres », poursuit D. Lucas. Cette photographie de 2014 révèle en effet la dynamique qui s’opère depuis trente ans dans les universités, les écoles et les entreprises. « On voit dans cette étude le résultat des actions menées en faveur de la parité, ces femmes montrent avec leurs parcours brillants qu’elles peuvent devenir de vraies leaders économiques », commente Valentine Ferréol, présidente de l’Institut G9+, réseau qui fédère 50 000 anciens élèves de grandes écoles autour du numérique. Elle ajoute néanmoins que « la prochaine étape pour ancrer ce constat dans la durée sera de les voir passer des fonctions support aux fonctions opérationnelles, en tant que DG ou PDG, puisqu’elles en ont largement les capacités ».
Et en effet, les profils distingués ont de quoi rassurer sur la possibilité de faire carrière lorsqu’on est une femme, y compris une femme en âge d’avoir des enfants. Pour ne citer que son exemple : Marguerite Bérard-Andrieu, Directrice générale Adjointe du groupe BPCE (2,9 milliards d’euros de résultats nets en 2013), 36 ans et première du classement, attend son deuxième enfant pour la fin du mois de mars.
Toutes âgées de 32 à 39 ans, elles font partie d’une génération de femmes entrées en plus grand nombre dans les grandes écoles que leurs aînées. On retrouve ainsi les diplômées des promotions des années 2000 de l’ENA comme Catherine Sueur, Directrice générale déléguée de Radio France et 8e du classement, ou Marie Cheval, PDG de Boursorama. Les Polytechniciennes comme Clotilde l’Angevin, 5e du classement ou Isabelle Laforgue (29e) trustent également le palmarès aux côtés des anciennes d’HEC, ENSAE ou Sciences-Po. « Ces femmes incarnent un vrai renouveau, par leur position elles ont un vrai pouvoir d’influence auprès des décideurs », estime V. Ferréol, qui salue aussi le rôle des grandes écoles dans l’émergence de ces carrières.
Le plus de cette génération par rapport aux précédentes ? Sans aucun doute l’orientation internationale de leurs parcours : Princeton, Harvard, Georgetown, ESCP Europe, Columbia ont été visitées pour certaines, mais la plupart au sein d’HEC, de l’ESSEC ou des ESC ont également bénéficié de formations à l’étranger, d’où leur présence dans des multinationales à des postes stratégiques comme Louis Vuitton, HSBC, Vivendi, Goldman Sachs, Ozon Russie ou Carrefour.
Très discrètement, des tendances de fond se dégagent aussi de ce classement, et on doit espérer qu’elles se confirmeront dès les éditions 2015 ou 2016 du Choiseul 40. D’abord la promotion de femmes à des postes-clés de la stratégie digitale des grands groupes, ou à la tête de pure-players numériques : Marie Cheval chez Boursorama, Amélie Oudéa-Castera qui dirige entre autres la branche digitale d’Axa France, Isabelle Laforgue chez SFR constituent des premiers signes encourageants.
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La deuxième lame de fond concerne les femmes entrepreneuses, et notamment dans le secteur digital : Fanny Péchiodat, PDG et fondatrice de MyLittleParis s’impose à la 33e place du classement comme la seule entrepreneuse de ce palmarès, mais on peut s’attendre à ce que ses camarades du Choiseul+ ( les 24 profils retenus au-delà des 40 élues) comme Céline Lazorthes (Leetchi) ou Canel Frichet (Winamax) viennent la rejoindre l’an prochain.
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Mais alors, faut-il avoir moins de 40 ans pour espérer construire la carrière qu’on mérite ? « Bien sûr que non », répond V. Ferréol, qui invite à ne pas se focaliser sur cette génération des trentenaires aux parcours précoces par rapport à la moyenne. « Il n’y a plus d’âge standard pour monter dans la hiérarchie, et les hauts-potentiels sont désormais sélectionnés dans des tranches d’âge plus larges dans les entreprises ». Bien plus, pour ne pas laisser retomber la dynamique encourageante qui pousse les femmes vers le haut, il s’agit de travailler sur la continuité des carrières, de 25 à 60 ans voire 65 ans…
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