C’est le Conseil national du sida (CNS), instance consultative placée auprès du ministre de la Santé, qui a donné l’alerte à la veille de Noël, s’inquiétant du maintien possible d’un dispositif légal qui interdit de procéder à des soins de conservation (la thanatopraxie) sur les défunts atteints du VIH. Les associations de lutte contre le sida ont vu rouge et n’ont pas tardé à manifester leur indignation en envoyant un texte collectif au ministre de la Santé, Xavier Bertrand, qui dénonce « une absurdité dangereuse et violente ». Celui-ci a alors décidé d’organiser une réunion avec les parties concernées le 10 janvier, sous la présidence du Directeur général de la santé, Jean-Yves Grall.
Les soins de thanatopraxie visent à retarder le processus de décomposition du corps en injectant dans le système vasculaire du formol, un produit antiseptique et conservateur, à la place du sang. Ils sont interdits depuis 1998 sur les personnes atteintes du VIH, mais aussi de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, d’hépatites virales B et C, et de tout état septique grave, afin de ne pas exposer les thanatopracteurs à des risques de contamination. Une argumentation soutenue par le Haut Conseil de la santé publique (HSCP) mais invalidée par le CNS et les associations, qui parlent de « discrimination légale sans fondement scientifique ». Le Pr Willy Rozenbaum, président du CNS, rappelle qu’ « il y a au moins un tiers des personnes contaminées [ par le VIH ndlr] qui s’ignorent » et qui échappent, par conséquent, à ces mesures funéraires exceptionnelles. La loi actuelle, prend à rebours, d’après lui, la logique de la prévention, et constitue « une fausse sécurité », les mesures de précaution devant s’appliquer à tous les cadavres.
Alimenter le moulin des préjugés quotidiens auxquels sont confrontés les séropositifs, voilà ce qui révolte les associations dans les mesures discriminatoires en vigueur. Jérôme Martin, d’Act Up-Paris, rappelle que « c’est le même type de raisonnement qui est à la base des refus de soins par les dentistes ». Le président d’Élus locaux contre le sida (ELCS), Jean-Luc Romero, a d’ailleurs saisi le Défenseur des droits, Dominique Baudis, à ce sujet. À l’heure actuelle, les familles ne peuvent demander qu’une toilette et un habillage de leurs défunts séropositifs.
Élodie Vergelati
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