Déjà connu des patients séropositifs, le Truvada pourrait être homologué pour lutter contre la transmission du virus du Sida, une première dans le combat contre cette pandémie. Ce sont les conclusions que viennent de rendre publiques un comité de 22 experts américains, dont une large majorité s’est prononcée en faveur d’une prescription pour les hommes homosexuels séronégatifs (19 pour, 3 contre), pour les couples hétérosexuels dont l’un des partenaires est séropositif (19 pour, 2 contre, 1 abstention) et pour les « autres individus risquant d’être infectés en raison de leurs activités sexuelles » (12 pour, 8 contre, 2 abstentions). Une recommandation communiquée à l’Agence américaine des médicaments (FDA : Food and Drug Administration) malgré des réticences du côté de certaines associations qui craignent une prise de risques accrue chez les personnes séronégatives à risques.
De 44 à 75% de diminution des risques d'infection
Pour l’instant, le Truvada, produit du laboratoire américain Gilead Sciences, est officiellement uniquement prescrit pour des personnes infectées par le VIH. Mais les résultats d’un vaste essai clinique qui s’est déroulé sur deux ans et demi (de juillet 2007 à décembre 2009) pourraient modifier la donne : le risque d’infection par le VIH chez les hommes homosexuels a diminué de 44% avec une prise régulière de Truvada. Une autre étude clinique a également révélé des résultats très positifs : chez les couples hétérosexuels dont l’un des deux partenaires est séropositif, les risques d’infection ont baissé de 75%. De plus, prescrire des antirétroviraux à titre préventif à des hommes homosexuels risquant fortement de contracter le virus du Sida (plus de cinq partenaires sexuels différents par an) deviendrait rentable en réduisant la propagation de l’infection selon une autre étude parue en avril. Actuellement, soigner un patient avec du Truvada coûte en moyenne entre 12 000 et 14 000 dollars par an.
Contre-indications des experts
Une quarantaine de personnes, dont des médecins et des militants d’association de lutte contre le VIH, ont témoigné devant le comité d’experts. Une majorité d’entre eux s’est élevée contre la prescription de Truvada à titre préventif. Ils ont particulièrement mis en avant les risques liés à la résistance aux antirétroviraux en cas de prise systématique et répétée, ainsi que la lourdeur du dispositif : le Truvada doit être pris quotidiennement pour être efficace, or « ce n'est pas dans la nature humaine de faire 100% ce qui est recommandé », selon Karen Haughey, infirmière en charge de patients atteints du VIH. En revanche, pour le Dr Anthony Fauci, directeur de l’Institut national américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID), ce type de traitement est précieux alors que 50 000 nouveaux cas sont découverts chaque année aux Etats-Unis (environ 2,6 millions dans le Monde) : « De ce fait, tout médicament préventif est important mais il ne devrait pas être utilisé pour se substituer aux autres méthodes de prévention existantes, dont le préservatif ». C’est la FDA, même si elle suit régulièrement les recommandations de ce comité, qui a finalement le dernier mot : elle rendra sa décision d’ici le 15 juin.
Laure Gamaury
Source : AFP
Crédit photo : AFP
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