Avec la progression des maladies chroniques, le vieillissement de la population, l’évolution de la démographie médicale mais aussi les scandales sanitaires à répétition, la télémédecine est plus que jamais plébiscitée. Bien qu’elle existait il y a quelques années déjà, avec l’usage du téléphone ou du minitel notamment, c’est avec le décret du 19 octobre 2010 qu’elle semble être officiellement née.
Un décret qui stipule que « relèvent de la télémédecine (…) les actes médicaux, réalisés à distance, au moyen d'un dispositif utilisant les technologies de l'information et de la communication ». En clair, sont considérés comme des actes de télémédecine : la téléconsultation qui a pour objet de permettre à un professionnel médical de donner une consultation à distance à un patient, la télé-expertise qui permet à un praticien de solliciter à distance l'avis d'un ou de plusieurs spécialistes, la télésurveillance médicale qui autorise un médecin à analyser à distance les données nécessaires au suivi d’un patient et la téléassistance par laquelle un professionnel de santé peut être secondé à distance par un autre au cours d’un acte.
Preuve d’une forte demande concernant l’e-santé, fin 2011, soit un an à peine après la parution de ce décret, la direction générale de l’offre de soins répertoriait déjà 256 activités de télémédecine. Rien d’étonnant à ce phénomène quand on sait que quelques 16 millions de Français se renseignent chaque mois sur l’un des 3 000 sites de santé, plaçant en tête Doctissimo et ses huit millions de visiteurs uniques mensuels, en moyenne.
60% des Français adeptes du Web-Santé
Mais que recherchent les patients sur Internet ? Le Web est-il en passe de se substituer aux professionnels de santé ? Il n’en est rien, si l’on en croit une récente enquête américaine publiée dans le Journal of Health Communication. Pour Hu Xinyi, co-auteur de l’étude pour laquelle plus de 500 patients ont été interrogés, « la méfiance n’est pas un facteur prédicateur important de recherche en ligne d’informations de santé avant une visite chez le médecin ». Et d’ajouter : « nos résultats suggèrent que les médecins ne doivent pas être sur la défensive quand leurs patients viennent en visite déjà très renseignés ».
Des résultats confirmés par un sondage CSA réalisé début 2011 pour Orange et Terrafemina. Selon ce dernier, parmi les 60 % des Français qui consultent le Web pour s’informer suite à un problème de santé, 73% cherchent à se faire une première idée avant d’aller voir un médecin généraliste. « Face à telle ou telle maladie, le fait d’échanger sur les traitements, les effets secondaires d’un médicament peut-être positif », estime quant à lui le docteur Dominique Dupagne, fondateur et gestionnaire du site de forums médicaux Atoute.org.
Quand les médecins créent l’information
Se tenir informé et jouer un rôle actif dans ses soins : telles sont donc les motivations premières des patients. Et pour cause, les médecins n’ont pas toujours le temps d’expliquer ni même de faire un examen clinique approfondi lors d’une consultation. C’est la raison pour laquelle le Conseil National de l’Ordre des Médecins (Cnom) encourage désormais ses professionnels de santé à orienter leurs patients dans leur usage du Web et à contribuer à la production de l’information en santé « à titre personnel ou dans le cadre de leurs organisations ». En début d’année, l’autorité publiait d’ailleurs un livre blanc visant à « encourager les médecins à investir plus largement le web santé ».
Répondant à cet appel du pied, plusieurs sites de e-santé ont rapidement émergés, parmi lesquels, Médecin Direct, Docteur Clic, Wengo ou encore Canal Médecine Praticien. Ce dernier permet entre autres aux praticiens de prodiguer des conseils et recommandations de leur choix aux patients, de leur proposer des programmes d’éducation thérapeutique ou encore de gérer à distance certaines pathologies chroniques. « Dans un monde de plus en plus connecté, face au burn-out des médecins, il s’impose de proposer une communication web », argumente Claude Tran Thiet, fondateur d’Imagence, Web Agency experte du marketing digital santé à l’origine du portail Web. « Nous comptons donc développer l’information au patient via Canal Medecine. A la suite d’une consultation, les patients devraient pouvoir rentrer dans les détails de leur maladie à travers le site Web de leur médecin ou de leur association de patients. »
Malgré tout, il semble que le Web ne remplacera pas de sitôt les consultations traditionnelles. « Un pré-diagnostic effectué à distance ne peut remplacer la palpation, l’impression générale lié à l’environnement, le non-verbal, etc. », juge pour sa part le docteur Loïc Etienne, médecin urgentiste et auteur de Zeblogsante.com. « Je ne dis pas que cela ne doit pas se faire car la véritable téléconsultation peut être utile pour le suivi des pathologies chroniques, ou pour avoir un deuxième avis de spécialiste, insiste le docteur Lucas. Mais cela doit être conforme à la loi, et à la déontologie médicale ».
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