« C’est un système très cloisonné avec beaucoup d’acteurs » dont « l’échange d’informations et la transparence doivent être améliorés ». C’est en ces termes que Jean-Claude Ghislain, directeur d’évaluation des dispositifs de l’Afssaps (devenue ANSM) jusqu’à fin 2012, a décrit, au cinquième jour du procès des prothèses mammaires PIP, le fonctionnement de l’ancienne agence de sécurité sanitaire.
« Ce système réglementaire (en matière de dispositifs médicaux, ndlr.) a des limites. C’est un système récent, qui date des années 90 », a-t-il ajouté, précisant que des directives européennes étaient actuellement en cours de révision. « Nous verrons comment, au niveau européen, on peut renforcer cette réglementation », a-t-il indiqué à la barre, selon l’AFP. Car pour l’heure, le marquage « CE » est délivré par un organisme certificateur choisi par l’entreprise. Les autorités publiques n’interviennent donc pas dans la mise sur le marché des dispositifs médicaux. « Les rapports du certificateur restent dans les mains du fabricant. C’est un des problèmes d’opacité du système », a en effet insisté Jean-Claude Ghislain.
Toutefois, selon lui, ce scandale a également pâti de la passivité des chirurgiens, qui n’auraient pas suffisamment fait remonter à l’Agence les incidents constatés, tels que les taux de rupture, les explantation, et ce, en dépit de leur obligation. Ainsi, l’Afssaps, dont le rôle est de collecter les données sur des événements graves, aurait commencé à être alertée en 2008, avec 34 signalements. Mais après mars 2010 et la découverte de la supercherie, l’autorité sanitaire a dû faire face à « un afflux important de déclarations rétrospectives d'explantations de prothèses PIP. C'est dramatique pour nous de constater que si on avait eu qu’une part de ces déclarations, nos chiffres auraient été tout autres, nous aurions pu aller plus rapidement à la conclusion ».
La veille, deux inspecteurs de l’Afssaps avaient raconté à la barre la manière dont ils avaient mis à jour la fraude de la société Poly Implant Prothèse qui durait depuis plus de dix ans. Alertés par des chirurgiens sur des taux de déchirement anormalement élevés, ils avaient découvert, en mars 2010, lors d’une inspection de l’usine varoise, les fûts de gel de silicone industriel non autorisé, et pourtant utilisé pour remplir les implants. Une découverte qui avait conduit, dans la foulée, au retrait des implants PIP du marché, et à la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise fondée par Jean-Claude Mas.