Les crèmes ultra-sophistiquées, packaging blanc immaculé orné d’une feuille verte et de la mention « bio », ont peut-être du souci à se faire. Lush, outsider britannique des cosmétiques éthiques, poursuit son cursus honorum français. Depuis la première boutique parisienne ouverte en 2005, une vingtaine ont vu le jour, secondées par le site de vente en ligne inauguré il y a trois ans, et qui réalise 10% des 10 millions d’euros de chiffre d’affaires de la marque dans l’Hexagone. Attendu comme le messie chez les adeptes des beurres corporels, crèmes solides pour les mains ou « ballistics » (boules parfumées pour le bain), le Spa Lush s’installe rue Vieille du Temple à Paris, début 2012. Portrait d’une marque portée par son fondateur charismatique –et végétarien-, Mark Constantine.
Avant de vendre des soins solides et sans emballage, cet Anglais allergique aux produits chimiques et trichologiste de formation –un scientifique du cheveu- a roulé sa bosse auprès de quelques grandes marques en tant que créateur de produits cosmétiques originaux : on lui doit notamment la plupart des best-seller des boutiques The Body Shop. Obsédé par la recherche des meilleurs ingrédients pour élaborer les meilleurs produits, cet activiste de l’environnement a voulu aller plus loin. Dans les années 90, alors que l’écologie est encore de trop dans les débats de société, il pense éthique et durable. « Je trouvais que mon travail sur le concept The Body Shop était vraiment très britannique, et j’ai voulu faire quelque chose de différent », raconte-t-il. « J'ai visité des tas de restaurants bio et végétariens en Allemagne, des marchés frais et des magasins de fromage hollandais pour trouver l’inspiration. J’ai toujours aimé la façon dont les fruits légumes étaient présentés dans les magasins d'alimentation. » D’où le merchandising ludique des boutiques Lush, où l’on peut toucher et tester sa crème de jour en pavé ou son « pain moussant » sur des étals en bois.
Créée en 1995 à Poole en Angleterre, la marque se développe petit à petit, en gardant son cap : « Nous savions que nous voulions faire des produits frais fabriqués à la main, ensuite nous avons écouté les retours de nos clients et nous nous sommes adaptés. » Le cahier des charges n'a pas bougé depuis 15 ans : des produits à base de fruits et légumes bio, d’huiles essentielles, de produits synthétiques vérifiés et non testés sur les animaux, aucun ingrédient d’origine animale à l’exception du lait et des œufs pour certains. Mais ce n’est pas le parti pris Vegan –le Véganisme inclut le végétalisme et le refus de toute exploitation des animaux- qui a rendu Lush si populaire. Ni l'activisme forcené de l’entreprise qui n'hésite pas à mettre en cage ses employés pour protester contre le gavage des oies, ou à les couvrir de pétrole pour protester contre les sables bitumineux du Canada. Rabat-joie le militant Lush ? C'est tout le contraire ! « Pour moi, Lush est un peu le Ben & Jerry’s de la cosmétique, c’est fun, ludique et appétissant, je pense qu’une bonne partie de la clientèle fonctionne au coup de cœur face à des produits très innovants », explique Pascale Brousse, spécialiste des tendances en cosmétiques et fondatrice de l’agence Trendsourcing. Lush a trouvé semble-t-il, le moyen de dérider l’univers de la cosmétique en surprenant sa clientèle au moins trois fois par an. Halloween, Noël, printemps ou été, toutes les occasions sont bonnes pour renouveler les gammes. Une équipe permanente est même chargée de parcourir le monde pour rapporter des idées, « il y a une volonté chez Lush de toujours garder l’esprit de la première fois, l’étonnement face à un nouveau produit », raconte Emilie Auvray, responsable du développement de la marque en France, elle ajoute que « même au sein de l’entreprise, les nouvelles créations sont dévoilées petit à petit, à coups d’annonces pour exciter la curiosité et de présentations festives. » A découvrir sous le sapin cette année : la gelée de douche « Chaud lutin » à la figue et au miel, ou la baguette magique pour faire mousser le bain...
Contre toute attente, Lush a pris en France. Pourtant, au début des années 2000 les premières tentatives de produits cosmétiques vendus au rayon frais ne font pas recette, selon Pascale Brousse, « les Français sont moins réceptifs à ce genre de produits, un peu trop excentriques, à l'inverse des Anglo-saxons et des Scandinaves généralement plus innovants ». Mettre un masque pour le visage au frigo ou veiller à ne pas laisser pourrir son gel douche ne sont pas des réflexes faciles à prendre. Mais la curiosité l'a emporté, soutenue par la tendance solide du « Do it yourself » et du « home made ». Pour 2012, Lush prévoit d'ouvrir encore 20 boutiques en France, et un Spa en plein coeur de Paris. « Ce sera un peu l'écrin de la marque, des soins et des produits ont été créés uniquement pour ce lieu où l'on entrera comme chez sa grand-mère, dans une ambiance de cottage de la campagne anglaise ». Parmi les curiosités de ce cabinet de bien-être, on a hâte de tester le massage Good Hour, où le chant des marins et les vapeurs du grand large viendront accompagner la relaxation, ou le soin holistique Synesthesia, qui adapte la prestation en fonction de notre état d'esprit. Le tout s'achèvera en douceur avec une tasse de thé dans une cuisine rétro, cosy, et un peu British, of course.
Le site de Lush
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