Amnesty International est pessimiste pour 2012. Dans un rapport de 80 pages, l’organisation prévoit la poursuite de la répression dans les pays arabes, et ce en dépit de la chute de Ben Ali en Tunisie, d’Hosni Moubarak en Egypte, et de Mouammar Kadhafi en Libye. Le Printemps arabe est porteur d’une démocratisation très fragile, qui n’est que cosmétique dans certains pays, quand elle n’est pas vivement écartée là où des dictateurs luttent pour le maintien au pouvoir à tout prix, comme en Syrie. Philip Luther, directeur par intérim d’Amnesty pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, prend soin de souligner toutefois la « résistance étonnante face à une répression parfois stupéfiante » des mouvements de protestation « menés dans de nombreux cas par des jeunes, les femmes y tenant un rôle central ». Une note d’espoir dans un océan d’inquiétudes.
Dans les pays libérés du joug des anciens dictateurs, la situation n’est pas pour autant favorable aux libertés fondamentales, tant l’exécutif intérimaire doit composer avec le pouvoir de l’armée (Egypte), les rivalités tribales (Libye), les réclamations de peuples qui en appellent à la purge administrative et à la transparence démocratique. Le rapport dénonce ainsi les violations des droits de l’homme dans ces pays en transition. Il estime que la situation est pire, par certains aspects, que sous le régime d’Hosni Moubarak, avec la répression violente de manifestations, qui a causé la mort d’au moins 84 civils entre octobre et décembre 2011. En Libye, quelques 7000 personnes sont détenues dans des centres vétustes tenus par des brigades armées, dans l’attente de procès qui ne viennent pas.
La Syrie fait exploser la moyenne annuelle du nombre de morts en garde à vue, calculée par l’organisation internationale. A la fin 2011, il a été fait état de plus de 200 cas de personnes mortes en garde à vue, un chiffre 40 fois supérieur à la moyenne annuelle des dernières années dans ce pays. Amnesty accuse l’armée et les services de renseignement syriens de commettre des « meurtres et des tortures s’apparentant à des crimes contre l’humanité ». Nul ne peut mesurer vraiment l’ampleur des sévices infligés à la population syrienne par un exécutif qui a verrouillé le pays comme jamais. La communauté internationale avoue son impuissance en réitérant ses mises en garde à l’encontre du régime syrien.
Elodie Vergelati
Lire le rapport complet d’Amnesty International
Crédit photo : Amnesty International/Sympathisants d’Amnesty International au Royaume-Uni lors de la journée mondiale d’action pour l’Égypte (Londres, février 2011)
(Avec AFP)
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