Le gouvernement de Hamadi Jebali, Premier ministre issu du parti islamiste Ennahda, vient de se mettre à dos le monde de la presse et des médias en nommant à des postes clés d’anciens caciques du régime de Ben Ali. Samedi dernier, le chef du nouveau gouvernement annonçait les noms des nouveaux dirigeants des organes de presse étatiques, et la liste est édifiante.
Mohamed Nejib Ouerghi
De 2003 à 2010, il fut le rédacteur en chef du journal « Le Renouveau », quotidien affilié au RCD, le parti du président Ben Ali. Il a été désigné comme futur Président de la Snipe (Société nouvelle d'impression, de presse et d'édition), et directeur de deux quotidiens : « La Presse » et « Essahafa ».
Mongi Gharbi
Le rédacteur en chef de « La Presse » était un fervent défenseur de l’ancien dictateur. Mongi Gharbi a collaboré, aux côtés de Mohamed Nejib Ouerghi à un blog intitulé « Journalistes avec Ben Ali 2009 », en publiant notamment l’article « Mes sept raisons pour voter Ben Ali ».
Faouzia Mezzi
La deuxième rédactrice en chef de « La Presse » ne déclenche pas moins les foudres de l’opinion. Dans un livre intitulé « Présidence tunisienne de l'Organisation de la Femme Arabe : initiatives et réalisations », elle dresse un portrait élogieux de Leila Trabelsi, l’épouse de Ben Ali. Cet ouvrage avait même reçu du président déchu le prix de la « meilleure production médiatique sur la femme ».
La censure de retour ?
Hier, Place de la Kasbah à Tunis, des centaines de journalistes étaient rassemblés pour protester contre la promotion de têtes favorable à l’ancien régime, le retour de la censure et les violences à l’encontre des journalistes.
En effet, la semaine dernière les hebdomadaires français L’Express, Le Nouvel Obs et Le Point, ont été interdits à cause de leur dossier spécial sur Dieu, la religion ou la civilisation arabe. Le quotidien El Maghreb a récemment reçu des menaces de mort suite à la publication d’un article titré « Sejnane, premier émirat salafiste en Tunisie ». Un correspondant de France 24 a par ailleurs été agressé quelques jours plus tard en se rendant dans cette localité rurale en train de basculer sous l’influence de la communauté salafiste.
Face à la grogne des journalistes le gouvernement aurait renoncé à quelques nominations, selon le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), qui a fait part d’un accord trouvé avec le gouvernement. Mais cette première tentative de faire revenir des défenseurs de l’ancien régime à la tête des médias a semé le soupçon sur les intentions du nouveau gouvernement islamiste.
Crédit photo : AFP/Archives/Hamadi Jebali
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