Il y a deux ans, après des années d’intenses pressions exercées par plusieurs organisations locales et internationales, le gouvernement de Bosnie-Herzégovine s’était enfin engagé à garantir les droits des victimes de violences sexuelles commises pendant ou après la guerre, mais en raison de l’impasse politique qui perdure au niveau de l’État, ce programme n’a toujours pas été adopté.
Dans un rapport publié aujourd'hui, Amnesty International appelle le pays à traduire dans les faits l’engagement qu’il a pris en 2010 concernant la garantie de justice, vérité et réparation pour des centaines de victimes. Ce document, intitulé Old Crimes, Same Suffering : No justice for survivors of wartime rape in noth-east Bosnia and Herzegovina, se penche sur la situation actuelle des femmes victimes de viol au cours du conflit qui a duré de 1992 à 1995, vivant dans le canton de Tuzla, au nord-est du pays.
Près de deux décennies après la guerre, des centaines de femmes continuent de vivre avec les conséquences du viol et d’autres formes de torture, tels que l’esclavage sexuel, la disparition forcée ou la détention arbitraire, commis au cours du conflit en Bosnie-Herzégovine. Ce rapport dénonce aussi le manque d’accès à l’aide médicale, psychologique et financière dont elles ont besoin « pour reconstruire leur vie brisée ». Pourtant, les témoignages des victimes vivant à Tuzla recueillis par Amnesty International révèlent des problèmes physiques et psychologiques graves que ces femmes continuent à rencontrer encore de nos jours (maladies sexuellement transmissibles, stress post-traumatique, anxiété ou encore insomnie).
« Je me souviens de tout et j'aimerais que ce ne soit pas le cas. Je me souviens de la torture. Ils m'ont battue jusqu'à ce que je ne puisse plus me lever. Ils venaient et m'emmenaient seule, puis je me retrouvais avec l'homme dans une pièce. J'ai été détenue pendant trois mois. J'ignorais où mes enfants se trouvaient. Je rêve toutes les nuits de ce qui s'est passé. Même avec ces comprimés, je fais ces rêves », a raconté M., qui est rentrée de Tuzla, où elle vivait en tant que personne déplacée depuis 2003, à Zvornik, en Republika Srpska, il y a plusieurs années
Aujourd’hui, Amnesty International a voulu rappeler qu’aucun des responsables directs des crimes commis envers les victimes interrogées n’a été traduit en justice.
Lire le rapport d’Amnesty International
Alexandra Gil
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