« La question de l’égalité des sexes est totalement ignorée ici », révèle Kaori Sasaki, présidente de la société de consultants Ewoman à propos du cadre professionnel au Japon. Or, la situation du pays se dégrade fortement : une population en chute démographique qui conduit à une réduction de la main-d’œuvre et à une menace latente sur le service de protection sociale qui pourrait bientôt ne plus être financé. Étant donné que le Japon refuse d’avoir recours à une immigration massive pour enrayer ce déclin, de plus en plus de personnes songent à féminiser les entreprises.
En effet, actuellement le Japon se classe à la 101e place sur 135 pays recensés en matière d’insertion des femmes dans le monde du travail. L’Azerbaïdjan (99e) ou même le voisin chinois (69e) sont devant le pays du soleil levant. Selon un rapport de Goldman Sachs, daté de 2010, si les femmes japonaises travaillaient autant que les hommes, le PIB du pays pourrait progresser d’environ 15%. Christine Lagarde, la patronne du FMI, s’est elle aussi prononcée en faveur de cette solution il y a quelques semaines.
Sept Japonaises sur dix quittent actuellement leur poste quand elles ont un enfant, même quand elles possèdent un haut niveau de qualification. Ce phénomène s’explique en grande partie par un système social défavorable à la maternité : peu de places en crèches, des frais de naissance mal remboursés, … De plus, les mentalités nippones restent très conservatrices : une étude gouvernementale conclut que, fin 2009, près de 50% de la population et 40% des Japonaises considéraient que la place des femmes était à la maison avec les enfants tandis que les hommes travaillaient à l’extérieur. Plus inquiétant encore, le chiffre est plus élevé chez la jeune génération que dans celle qui a vécu au rythme des revendications féministes des années 1970.
Pourtant, selon Masahiro Yamada, professeur spécialiste de sociologie familiale à l’Université Chuo de Tokyo, le pays n’a plus le temps de discuter de la parité professionnelle. Il doit agir dans ce sens pour sa survie. Elle ajoute que la féminisation des secteurs professionnels pourrait apporter un renouveau démographique : en mettant en place ce qu'elle nomme un « cycle vertueux » – plus de femmes au travail apportent plus de revenus donc une plus grande possibilité de faire des enfants et de les élever correctement, et par extension, plus de petits Japonais qui pourraient repeupler le pays et faire redémarrer la croissance démographique –, les prévisions d’une étude officielle datant du début de l’année 2012 pourraient alors être moins catastrophiques. Elle planifie une baisse de la population de 32,3% d’ici 2060, soit 86,74 millions d’habitants contre 128 millions aujourd'hui.
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