« Viva il papa !» a-t-on entendu mercredi soir sur la place Saint-Pierre de Rome, juste après que le cardinal Jean-Louis Tauran eût prononcé la formule canonique : Habemus papam. « Mais quelle place pour la Mamma ? », pensent très fort les féministes depuis cette élection… Le premier souverain pontife jésuite de l’histoire est-il celui qui fera progresser la place des femmes dans l’Église ? Sans trop s’avancer, on peut craindre que François 1er soit à cet égard au moins aussi conservateur que ses prédécesseurs sur la question.
Malgré son sourire béat et ce trait d’humour complice qui a marqué sa première intervention -« Les cardinaux sont allés me chercher au bout du monde », a déclaré l’Argentin en préambule de sa prière face aux Romains-, le pape n’en est pas moins un fervent gardien d’un catholicisme traditionnel et très attaché à la doctrine de l’Évangile sur la famille, le mariage et l’avortement. Le père Jorge Mario Bergoglio a été désigné cardinal par Jean-Paul II en 2001, et s’est illustré depuis comme un guide moral exemplaire, modéré et très proche de ses fidèles. Défendant avec ferveur le sort des plus pauvres, il s’est aussi prononcé très explicitement contre la légalisation du mariage homosexuel dans son pays en 2010, et contre le droit des transsexuels à changer d’état-civil.
D’un autre côté, ce fan de football qu’on dit timide et discret fait figure de progressiste sur certains aspects. L’homme qui n’a jamais habité l’archevêché de Buenos Aires, préférant occuper un appartement proche de son Église, s’est toujours refusé à porter son habit pourpre d’archevêque et à profiter du chauffeur privé offert par son statut. En bus et en métro, il n’a cessé d’aller passer son temps libre dans les quartiers les plus défavorisés, dénonçant au passage la corruption et les excès du libéralisme. Ce sens de la justice et cette ouverture au monde se retrouvent ainsi dans certaines prises de position remarquables : notre nouveau pape a ainsi concédé que la contraception était « utile pour prévenir certaines maladies ». En septembre 2012, Monseigneur Bergoglio osait aussi taxer d’ « hypocrisie » les prêtres qui refusaient de baptiser les enfants nés hors mariage.
Réserve ou révolution, quelle sera la voie choisie par le nouveau pontife ? Nombreux sont les catholiques à croire en tout cas que le renouvellement des valeurs morales entachées par les affaires de corruption au Vatican et de pédophilie des prêtres doit venir d’une plus grande présence féminine à tous les niveaux de l’Église. D’après un sondage CSA pour BFM TV, 61% des femmes (et 60% des Français) veulent une politique « plus progressiste » du nouveau pape. En témoigne aussi l’initiative de ce conclave féminin « clandestin » réuni à Paris le 9 mars dernier. France 24 rapporte en effet que le Comité de la Jupe, association catholique créée en 2008, a rassemblé 72 femmes le week-end dernier pour dénoncer l’absence « injuste et contre-productive » des femmes au sein des institutions de l’Église. La déclaration finale de ce conclave conclut que l’ensemble des maux dont souffre l’Église doit être mis sur le compte de ce traitement des femmes : « absence de sang neuf, asthénie, recul des valeurs morales, méfiance envers l’autre, oubli de ses aspirations ». Et cette association de proposer que les femmes reprennent la parole, d’abord par l’homélie, le commentaire des Saintes Écritures pendant la messe, mais surtout par l’ordination de femmes prêtres, pour voir un jour un conclave mixte élire le nouveau pape, ou la nouvelle papesse ?
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