Le vélo est-il devenu, à l'instar de certains sports comme le football, une « activité de mecs », virile et agressive ? Pour beaucoup de femmes aux États-Unis, en particulier celles issues des communautés hispanique et afro-américaine, faire du vélo n'est pas un loisir évident à pratiquer. C'est ce que révèle un article de Rue89, intitulé « Pourquoi les Noires et les Latinas ne font-elles pas de vélo ? » Parce que, d'après l'auteure de l'article, considéré comme une activité trop masculine, le vélo est aussi, pour de nombreuses femmes appartenant à une minorité ethnique, trop typé. Faire du vélo, c'est pour les Blancs, semblent-elles penser, s'interdisant elles-mêmes d'emblée la liberté de pratiquer cette activité. « Aux États-Unis, où les communautés sont à cheval sur leurs spécificités, l'accès au vélo est entré dans la catégorie des nouveaux combats à gagner pour les femmes de certaines minorités ethniques », note la journaliste de Rue89.
Comment ? En convaincant « leurs "sœurs" réticentes que les barrières sont dans leur propre tête », grâce à la création de clubs féminins et communautaires de cyclisme. Ni typé, ni genré : le vélo est ouvert à tous et à toutes. Tel est le message de l'Ovarian Psyco Cycles Brigade, le premier club féminin - et féministe - pour Latinas cyclistes, créé ce mois-ci à Los Angeles. Pour Evelyn Martinez, fondatrice du club, les Latinas sont avant tout réticentes à pratiquer le cyclisme car persuadées qu'il s'agit d'un loisir dangereux. Interviewée par le Los Angeles Times, elle explique être « montée très tard sur un vélo à cause de l'appréhension parentale. Pour beaucoup de familles latinas, les femmes sont considérées comme fragiles et doivent être davantage protégées ». Sa mère « lui répétait sans cesse que les bicyclettes étaient faites pour les hommes ».
Même constat auprès de la communauté noire américaine, qui elle aussi a mis longtemps à enfourcher un vélo. C'est d'ailleurs pour convaincre les Afro-Américaines que leurs craintes étaient infondées que s'est créé, en 2011 dans la capitale américaine, le Black Women Bike DC, un club de cyclisme exclusivement réservé aux femmes noires. Veronica Davis, sa créatrice explique : « Les partisans du vélo en ville pensent que des groupes comme Black Women Bike DC […] pourraient encourager les Afro-Américains à se déplacer davantage à bicyclette. »
Pourtant, note-t-elle, bien que le club compte aujourd'hui plus de 1 100 membres, « la disparité raciale » entre les usagers du vélo reste « énorme ».
La disparité entre les sexes aussi. À Los Angeles, Evelyn Martinez de l'Ovarian Psyco Cycles Brigade constate que si le vélo séduit de plus en plus de jeunes femmes, ces dernières restent toujours beaucoup moins nombreuses que les hommes. Selon elle, seul un cycliste sur cinq est une femme à L.A.
Son objectif aujourd'hui ? Continuer de persuader les femmes - Latinas notamment - que le vélo est une activité ludique et sportive comme les autres, mais convaincre aussi les hommes de laisser aux femmes la place qu'elles méritent sur les pistes cyclables. En organisant, notamment, des promenades à vélo mixtes. Leur devise : « Nous ne sommes pas là pour savoir qui pédale le plus vite, nous sommes une sororité. »