Pour les surprises, passez votre chemin. Ce mardi, Vitali « Dr. Ironfist » Klitschko confirmait sa candidature au poste laissé vacant par Viktor Ianoukovitch. Il représentera les couleurs de l’Oudar (« Coup de poing » en Ukrainien), 3ème formation du pays défendant un programme libéral, saveur centre-droit. Figure du mouvement pro-européen EuroMaïdan, l’homme bénéficie d’un fort capital de sympathie auprès d’une jeunesse plus occidentalisée que les générations précédentes. De plus, l’ex-champion du monde des poids lourds est le premier titulaire d’un doctorat (en « Sciences du sport ») à avoir obtenu le titre. Pourtant, il a renoncé à sa carrière sportive pendant les manifestations, pour se consacrer pleinement à la politique. En homme providentiel ?
Question de point de vue. En mai 2013 par exemple, il rassemblait 15 000 personnes à Kiev pour exiger la libération de Ioulia Timochenko, ex-candidate « orange » aux présidentielles de 2004. Une solidarité pour le moins étrange. En effet, à la tête du parti national-conservateur « Patrie », cette oligarque s’est imposée comme la principale figure de l’opposition après avoir fait fortune dans le gaz. Mais des soupçons de détournement de fonds planent toujours sur elle, appuyés notamment par Mediapart qui aborde ses liens avec l’ex-premier ministre Lazarenko. De plus, la communication du boxeur, basée sur sa « success story » européenne et sa (supposée) incorruptibilité a déjà été remise en cause. En effet, il se débattra toujours avec une photo où il apparait aux côtés de l’ex-boss de la mafia Viktor Rybalko. On l’accuse notamment d’avoir travaillé comme collecteur de dettes pour ce dernier dans les années 90, ce qu’il dément.
Mais l’égérie des caméras occidentales est également un ami et admirateur de l’Allemagne actuelle. « Je suis très heureux de coopérer avec la CDU [Parti de la chancelière Angela Merkel], et nous essayons de mettre en place la même structure dans notre pays. » déclarait-il. De fait, Klitschko a longtemps vécu et combattu en Allemagne, tandis que l’entreprise Klitschko Management Group GmbH, qui gère son image, est encore située sur les bords de l’Elbe. C’est pourquoi, alors qu’il le décorait de l’Ordre du Mérite de la République Fédérale d'Allemagne, l’ambassadeur Hans-Jurgen Heimsoeth l’a décrit comme « l’un d’entre nous ». D’ailleurs, le 24 février, Klitschko déclarait « Je suis persuadé qu’une lustration est nécessaire au sein des forces de l’ordre afin de restaurer leur réputation ». Un terme qui renvoie aux véritables chasses à l’homme lancées après la chute du mur, notamment en RDA, contre les collaborateurs des ex-régimes en place. Souvent jusqu’à l’excès, voire la purification idéologique. C’est à se demander si l’Europe, quand il s’agit damer le pion à Poutine, ne penserait pas avec une logique de guerre froide. Peu importe le flacon, pourvu qu’on ait le gaz ?