Alors qu’une récente étude révélait que plus de trois Français sur dix adhéraient aux idées du FN, le parti dirigé par Marine Le Pen fait face, à nouveau, à la controverse, concernant certains de ses candidats aux municipales. Deux polémiques naissantes et concomitantes à moins de deux mois du premier tour, auxquelles s’ajoutent d’autres « affaires » survenues précédemment. Retour sur ces principaux dérapages.
>> Mais au fait, c'est quoi une quenelle ? <<
Marie d'Herbais de Thun, tout d’abord. Cette candidate à Savigné-l’Evêque (Sarthe), proche de la famille Le Pen, a jeté le trouble en faisant une quenelle devant les caméras de France 3 Pays-de-Loire. Interrogée à propos d’une photo sur son compte Facebook où elle mimait le geste si prisé des fans de Dieudonné, elle a assumé crânement et bravache, l’a réitéré. Mimique « anti-système » sans la moindre connotation antisémite, appuie-t-elle. Et de l’expliquer dans un phrasé pour le moins abrupt : « La quenelle c'est pour dire : Valls, machin, le système, tous les pourris, les politiques qui s'enrichissent sur notre dos, etc., Allez tous vous faire foutre ! » Fin de citation.
Il n’est pas certain que les instances du FN apprécient la provocation. Durant la polémique Valls-Dieudonné, Marine Le Pen avait estimé qui fallait « éviter de faire » la quenelle, en ajoutant : « nous n'avons aucune raison de chercher à heurter ou blesser des gens ». A noter tout de même que son propre père, accompagné du député européen Bruno Gollnisch, avait aussi été pris en « flagrant délit » de quenelle en octobre dernier. Chose pour laquelle Jean-Marie Le Pen, fidèle à sa réputation, avait dit n’éprouver aucun regret.
La situation à Châteauroux est, pour la peine, bien plus embarrassante pour le parti frontiste. Ce dernier n’a, d’ailleurs, pas tardé à réagir. Bastien Durocher, co-listier de Matthieu Colombier, tête de liste locale, a été débarqué après que des captures d’écran de son Facebook aient été publiées sur le site Internet de la Résistance antifasciste de l'Indre (Rafi). Ces opposants au FN ont mis à jour des photos où l’intéressé exhibe fièrement un tatouage néo-nazi sur le haut du bras.
En guise de défense, Bastien Durocher fait pourtant part de son incrédulité – « Je ne comprends pas : j'ai supprimé cette photo de mon profil Facebook en septembre 2011 » – , plaide « l’erreur de de jeunesse » – «Je n'avais même pas forcément ces idées-là» – et rappelle que le vilain dessin ne sera bientôt qu’un mauvais souvenir – « J'ai d'ailleurs un rendez-vous le 4 mars pour faire enlever ce tatouage ». Insuffisant aux yeux de son parti qui l’a retiré, malgré le soutien Matthieu Colombier, de la liste pour les municipales.
Anne-Sophie Leclère, autre candidate évincée. Le 17 octobre dernier, la candidate à la mairie de Rethel compare Christiane Taubira à un singe, au cours d’un reportage diffusé par Envoyé spécial sur France 2. Et de déclarer sans ambages : « Je préfère la voir dans un arbre après les branches que la voir au gouvernement comme ça. » Celle qui s’était présentée en 2012 aux élections législatives dans la 1re circonscription des Ardennes (16,76% des voix) réagissait à une question de la journaliste (à partir de 34'10) à propos d’un photomontage posté sur son mur Facebook, dans lequel l’image de la garde des Sceaux est accolée à celle d'un singe habillé. « Non, non, ça n’a rien à voir avec du racisme », s'était-elle défendu avant d’ajouter : « Un singe c'est un animal, un Noir ça reste un être humain (...) J'ai des amis qui sont noirs. »
Tollé politico-médiatique immédiat. Au lendemain de la diffusion du reportage, Anne-Sophie Leclère est suspendue officiellement par son parti. Cette polémique tombe, il est vrai, au plus mal alors que Marine Le Pen conteste, avec vigueur, l’étiquette de parti d’extrême droite et menace de poursuite quiconque le qualifierait de cette façon.
>> “Marine Le Pen est-elle une candidate comme les autres ?””, participez au débat <<
Le « Chut, c'est un juif » de François Chatelain
Concernant François Chatelain, là aussi les sanctions ne se sont pas fait attendre. Le candidat aux municipales de Neuville-en-Ferrain a été exclu du parti frontiste pour avoir diffusé, sur sa page Facebook, une image évoquant une mainmise sioniste sur la France. Ouvertement antisémites, ses publications sur son profil social furent dénoncées par le député Gérald Darmanin (UMP) dans une lettre adressée directement à Marine Le Pen. Missive qui n’est donc pas restée sans réponse.
Au-delà de ces différentes erreurs de casting, il semble bien le FN éprouve du mal à boucler ses listes en vue des élections municipales (800 communes). Le 8 janvier dernier, France Info estimaient ainsi à seulement 120 le nombre de listes bouclées, alors que 200 autres étaient constituées à 80%. Malgré son ambition maintes fois affichée de devenir le premier parti de France, la formation politique de Marine Le Pen ne pourra manifestement pas être aussi présente qu’elle l’espérait. « Les prévisions sont à revoir à la baisse. De plus de 600 listes annoncées par le Front en octobre, le parti n'en revendique maintenant plus que 500. En réalité, je pense que le FN devrait tourner entre 400 et 500 listes. Dans bon nombre de villes, les électeurs ne pourront pas voter pour un candidat FN », analysait ainsi, en janvier dernier pour Terrafemina, Jean-Yves Camus, chercheur à l'IRIS spécialiste de l'extrême droite.
Cette difficulté à recruter un personnel politique qualifié fragilise manifestement le parti, façonné par Jean-Marie Le Pen, à l’orée d’échéances électorales importantes. Eu égard à son histoire et son programme, il attire encore – malgré lui ? – un certain nombre de militants qui font peu mystère de leur xénophobie. Autant de controverses, ayant toutes attrait à des questions de racisme, qui pollue grandement le message politique que la hiérarchie du parti tente d’imprégner depuis plusieurs années. A savoir que le Front national n’est pas un parti d’extrême droite et, encore moins, raciste. Force est de constater, qu’avec certains candidats, l’objectif n’est pas simple à tenir.