Lorsqu’une jeune femme tape aujourd’hui « IVG » dans un moteur de recherche, la première adresse qui lui est proposée, juste derrière Doctissimo, est le site ivg.net. Derrière l’apparence d’un site officiel qui se présente comme un « centre national d’écoute anonyme et gratuit » et comme « centre de documentation médicale sur l’avortement », il recouvre en fait une association qui met en garde contre les risques liés à l'avortement et les troubles psychologiques qu’il entraîne. Le site propose même un numéro vert d’écoute. Une information biaisée, que la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem a pointé du doigt cette semaine, en déclarant que le gouvernement devait « soutenir des sites plus respectueux de ce droit fondamental [le droit à l’avortement, ndlr] ». Face à cette perte de terrain sur la Toile des sources d’information fiables, la ministre a annoncé sa volonté d’élaborer une stratégie Internet pour apporter aux internautes une information neutre et officielle sur la question de l’avortement.
Lieu de toutes les polémiques et de tous les dérapages, Twitter est également le terrain de jeu favori des anti-IVG, militants actifs ou non. Espace idéal pour donner son avis mais également pour tenter de convaincre les autres internautes, le réseau social voit fleurir les prises de position radicales face au droit à l’avortement. « Les jeunes meufs tombent enceinte pourquoi?! Psk elles se protegent pas et pourquoi? Psk l’avortement est autorisé. Voilà tout! », commente ainsi une twittos. Le débat sur le mariage pour tous a étrangement relancé celui sur l’IVG, donnant à nouveau du grain à moudre à certains anti : « Perso, je suis d’accord, je veux pas que mes impôts paient la PMA. Pour les hétéros déjà. Ni l'IVG tant qu'on y est », lance ainsi un internaute. « L'IVG n'était pas un progrès », « Souvenons-nous que la loi Veil a voulu encadrer l'IVG : or il n'y a jamais eu autant d'IVG que depuis qu'elle a été autorisée », peut-on également lire. « Les réseaux sociaux ont accéléré la visibilité des propos tenus sur le sujet, notamment chez les jeunes. On retrouve souvent des contre-vérités ou des prises de position extrêmes, qui circulent rapidement sur Twitter », analyse Delphine Rannou, community manager chez Terrafemina, qui observe quotidiennement les échanges entre twittos sur cette question. Souvent au détriment de l’information des jeunes femmes sur leurs droits.
Elles sont encore des enfants et malgré tout deviennent mères. À l’heure où les filles commencent généralement à s’intéresser aux garçons, elles sont déjà plongées dans les couches et les biberons nocturnes. MTV a ouvert sur ce sujet la voie de la téléréalité avec son programme « Sixteen and pregnant » avant de lancer la suite avec l’émission « Teen Mom ». Le principe ? Suivre durant plusieurs mois des adolescentes enceintes puis leur vie quotidienne avec des nouveau-nés à la maison. Grossesses accidentelles ou désirées, les jeunes femmes âgées en général entre 15 et 17 ans laissent entrer les caméras dans leur intimité de future mère encore aux portes de l’adolescence. Un concept qui a fait des émules et a été importé en France début 2012 avec le programme « 16 ans et enceinte ». Autant de gamines, plus ou moins entourées, qui vivent des parcours certes touchants mais rarement faciles. Contraception, IVG, pilule du lendemain : il n’en est jamais question dans ces portraits d’ados mamans à la sauce « real tv ».
Dans le XXe arrondissement de Paris face à l’Hôpital Tenon, un samedi par mois c’est le même rituel crispant : un petit groupe de catholiques intégristes se réunit et prie sur le trottoir. Leur cible : le centre IVG qui a rouvert ses portes en avril 2011. Loin des opérations commandos violentes que ces groupuscules pouvaient mener dans les années 1980, ce petit groupe d’irréductibles réunis par l’association SOS tout-petits, fondée en 1986 par le Dr Xavier Dor, se contente de réciter ses prières et ses chants. Mais les propos sont vite virulents et le message des banderoles clair : « on a aboli la peine de mort et jamais on a autant tué », « la vie est un don de Dieu ». Les manifestants soutiennent des pancartes montrant des images de fœtus et des icônes religieuses. « Je viens prier pour que ces enfants, on arrête de les exterminer », « je suis pour la vie », « l’avortement est un meurtre », témoignent les participants catholiques d’extrême droite venus dénoncer les « crimes » perpétrés dans le centre IVG. Face à ces manifestations intégristes, les riverains crient au ras-le-bol et dénoncent des propos « moyenâgeux » tenus par des « fachos ». Les tensions sont vives, mais l’association SOS tout-petits est autorisée tous les mois par la préfecture de police à manifester. « J’ai écrit à de nombreuses reprises au Préfet de police de Paris, (…) pour demander l’interdiction des rassemblements de l’association SOS tout-petits. (…) La lutte pour le droit des femmes à disposer librement de leur corps continue ! », soutient quant à elle sur son compte Facebook Frédérique Calandra, l’édile socialiste de l'arrondissement.
IVG : une stratégie Internet pour soutenir le droit à l'avortement
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