Christophe Blot : Cela n’est pas réellement une surprise. En effet, la menace de la perte du triple A planait sur la France depuis plusieurs mois, les agences avaient d’ailleurs mis la France sous surveillance. Les annonces montraient que cette décision de dégradation allait intervenir incessamment sous peu. D’ailleurs la réaction des marchés ne montre pas de mouvement de panique. Les marchés interprètent certes cette décision comme une mauvaise nouvelle, mais ils l’avaient en partie anticipée. La France reste dans le club des pays qui ont les meilleures notations. En la faisant passer de triple A à double A, J&P ne la positionne plus dans les meilleurs élèves, mais la situe toujours parmi les bons élèves. Cette perte du triple A ne signifie absolument pas que la France est en situation de faillite ou que sa dette n’est pas soutenable.
C.B. : Il est vrai que le triple A est devenu une sorte d’indicateur qui cristallise tout, qui représenterait à lui seul la santé économique et financière d’un pays. Or avant tout il y a d’autres indicateurs qui révèlent l’état d’un pays : le chômage, la croissance, etc. L’évolution des taux et des spreads (écarts de crédit) laissaient prévoir depuis longtemps déjà que la France risquait de voir sa note baissée d’un cran. Si l’agence S&P a dégradé la note française, ce n’est pas parce que la situation s’est soudainement dégradée : elle prend simplement acte de la crise et considère que la France a des efforts à faire en matière de finances publiques.
C.B : La France pourra voir sa note rétablie si S&P juge qu’elle prend des mesures fiables pour diminuer le déficit et également si la croissance s’accélère à nouveau en 2012. Les mesures à venir seront scrutées par les agences de notation qui jugeront la situation française. Il est difficile de prévoir si la France récupérera son triple A avant la fin de l’année. Cela dépendra de sa capacité à articuler la nécessité de réduire le déficit et la nécessité de soutenir la croissance en période de chômage élevé. L’élection présidentielle sera primordiale : les agences évalueront la crédibilité des propositions du prochain chef d’Etat en matière de finances publiques et de croissance. D’ailleurs, si Standard & Poor’s a dégradé la note française, ce n’est pas le cas des autres agences de notation, comme Fitch. Il se peut en effet qu’il y ait parfois un écart d’un cran entre les notations des différentes agences.
*OFCE : Observatoire français des conjonctures économiques
Crédit photo : AFP
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