Josiane Aknine est retraitée. Mais, il y a un an, à 65 ans, elle a décidé de reprendre le travail et de devenir « mamie-nounou ». Depuis, tous les jours à la sortie des écoles et tous les mercredis, elle s’occupe de deux petits garçons, Maxime, 4 ans et Louis, 7 ans. Et elle n’est pas une exception. Depuis 2009 (1), les retraités peuvent en effet facilement cumuler pension et salaire. Du coup, comme elle, de plus en plus de Français de plus de 65 ans travaillent : 146 000 en 2010 contre 104 000 en 2003 (2). Chez seniorsavotreservice.com, une agence qui propose de mettre en lien les demandeurs d’emploi et les particuliers employeurs, 50% des candidats sont des retraités. Autant de femmes que d’hommes qui proposent essentiellement de la garde d’enfants, du gardiennage ou des travaux de bricolage. Pour Josiane Aknine, être « mamie-sitter » était une évidence : « Je ne voulais plus faire un métier qui m’occupe à plein temps et j’avais très envie d’être auprès des enfants ». Et elle n’est pas la seule à vouloir ce job. « Il y a une explosion du nombre de propositions de mamies-nounous, constate Valérie Gruau, la fondatrice de seniorsavotreservice.com. Et la demande va avec ! Les familles sont séduites : les candidates -quasiment aucun homme ne postule- sont souvent bien plus disponibles que ne pourrait l’être un étudiant. Et c’est aussi une façon pour les parents de faire un lien entre les générations quand la famille est loin. »
Conserver un lien social
Mais si Josiane Aknine fait ce métier « par plaisir », les raisons qui, au départ, l’ont poussée à chercher un emploi étaient d’abord financières. Hôtelière pendant toute sa carrière, elle dispose aujourd’hui d’une retraite de cadre. Et pourtant, même si sa pension lui permet de « vivre correctement », elle reconnaît avoir besoin « d’un petit plus pour les loisirs ». « Clairement, la motivation économique arrive en première position des raisons d’un retour à l’emploi, note Valérie Gruau. En plus de la crise, les retraités doivent souvent aider leurs propres parents. » Une réalité encore plus difficile à gérer lorsqu’on est une femme : en France, en 2010, une retraitée touchait encore une pension inférieure de 42 % à celle d’un homme (3). Mais pour Valérie Gruau, il y a aussi chez les plus de 60 ans, une réelle envie de « conserver un lien social ». Une opinion que partage Serge Guérin, sociologue, et spécialiste des seniors (4) : « Changer de rythme de vie peut entraîner un sentiment de désœuvrement à un âge où l’on est encore pleinement actif. » Et si les seniors ont longtemps souffert d’une image négative, celle-ci a évolué : « Même si certaines représentations perdurent –les femmes d’un certain âge sont douées pour s’occuper des enfants-, les seniors ne sont plus considérés comme ancrés dans le passé, mais bien tournés vers l’avenir » constate le sociologue. Pas étonnant donc que le métier de mamie-sitter explose : « Il est à la conjonction de toutes ces réalités, et d’une autre qu’il ne faut pas oublier : les parents ont aussi de plus en plus de difficultés à trouver des modes de garde… » Alors pour répondre à la demande, certaines retraitées ont même décidé de se lancer dans les séjours au pair… Et les papys, eux, quand est-ce qu’ils s’y mettent ?
1. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a largement assoupli le régime de cumul emploi-retraite, qui n’était jusqu’alors possible que dans certaines conditions et certaines limites.
2. Source : Insee, enquêtes Emploi du 1er trimestre 2003 au 4e trimestre 2010.
3. Selon le rapport de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) « Les retraités et les retraites en 2010 », Collection Études et statistiques, 2012.
4. Auteur de La nouvelle société des seniors, Éditions Michalon, janvier 2011.
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