Jennifer a 39 ans et attend son premier enfant avec sa compagne Caroline, 35 ans. C’est d’ailleurs cette dernière qui porte leur petite fille. Seul hic, assistante sociale dans la fonction publique, Jennifer n’a pas de facto droit à un congé parental pour la naissance de son enfant, puisque ce statut n’est pas encore reconnu par l’Etat. Mais faisant fi de la législation, elle a demandé une dérogation à son employeur pendant la grossesse de Caroline, en juillet 2012.
Vincent Eblé, président socialiste du Conseil général de Seine-et-Marne, a accepté la requête : « Il est vrai que je me suis interrogé, mais j'ai rapidement dit oui : ce que l'on accorde naturellement à un homme, il me semblait raisonnable de l'accorder à une conjointe ! À partir du moment où la légalisation du mariage entre deux personnes du même sexe est tranchée - et pour moi elle l'est - il me semble normal de traiter tous les couples de la même façon ». Il a d’ailleurs précisé que sa décision est locale, et qu'il en « assume évidemment seul la charge financière ». Un droit qu’il octroiera à tous ses employé(e)s qui en feront la demande.
Pacsée depuis onze ans avec Caroline, Jennifer apprécie cette décision qui, au-delà d’un moment privilégié avec sa nouvelle famille, lui permet de se sentir reconnue par son employeur en tant que femme vivant en couple avec une autre femme et fondant une famille : « Je me sens estimée, c'est très important. Car il existe une réelle souffrance devant l'hypocrisie du système actuel. Il y a une injustice dans le fait de n'être considérée que dans le cadre d'un foyer fiscal, d'avoir des devoirs sans l'ensemble des droits qui vont avec. Nous n'avons jamais rencontré de discrimination ni d'hostilité. Au contraire, que ce soit le personnel médical ou les services publics, tous me considèrent déjà comme le second parent de manière officieuse, reflet de l'évolution sociétale ».
C’est la première fois que le secteur public autorise un salarié à bénéficier du congé de parentalité quand les parents sont du même sexe. En revanche, les entreprises privées et notamment certains grands groupes français ont devancé la législation sur le mariage et l’adoption pour tous, promis par François Hollande : Cofiroute, L’Oréal France et plus récemment SFR ont inscrit le congé de parentalité comme un droit pour tout employé, qu’il soit parent biologique ou non, et qu’il soit en couple hétérosexuel ou homosexuel.
En attendant la loi prévue pour 2013, Jennifer et Caroline s’apprêtent à accueillir leur premier enfant, « ravies d'avoir contribué à l'évolution de la reconnaissance des familles homoparentales dans le milieu professionnel ». Prochaine étape familiale : le mariage, prévu « au printemps 2013 ».
Laure Gamaury
Crédit photo : Banana Stock
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