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Interdits d’enfants : "Le débat sur la GPA n’a pas eu lieu"
Publié le 9 janvier 2013 à 09:00
Par Marine Deffrennes
France 2 diffuse ce mercredi 9 janvier à 20h45 « Interdits d'enfants », un téléfilm inédit, adaptation fidèle de l’histoire de Sylvie et Dominique Mennesson. Ce couple français a eu recours à une mère porteuse en Californie pour donner naissance à des jumelles aujourd'hui âgées de 12 ans. Après des années de déboires judiciaires, les fillettes n'ont toujours pas de papiers français et leur filiation n'est pas reconnue. Un témoignage éclairant sur la réalité de la gestation pour autrui (GPA) pour faire bouger les lignes de cette question délicate. Entretien avec Sylvie Mennesson.
Interdits d’enfants : "Le débat sur la GPA n’a pas eu lieu" Interdits d’enfants : "Le débat sur la GPA n’a pas eu lieu"© DR
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Terrafemina : Pourquoi avoir accepté que ce film soit réalisé ?

Sylvie Mennesson : Plusieurs sociétés de production ont contacté notre maison d'édition (Michalon) pour adapter notre livre « Interdits d'enfants ». Nous n'étions pas contre l'idée car nous voulons faire connaître au grand public ce qu'est vraiment la gestation pour autrui, et comment la France se positionne sur cette question. Elle est en effet le seul pays européen à interdire non seulement le recours à une mère porteuse, mais également la transcription de l'état civil des enfants nés de mères porteuses à l'étranger. Le réalisateur Jacques Renard nous a rassurés car il voyait les choses avec le côté humain, il était conscient des enjeux et voulait montrer que nous étions une famille comme les autres, qui aspirait juste à donner à ses enfants un état civil stable. Tout le film tourne autour des enfants, le véritable enjeu est de faire régulariser leur situation. François Hollande l'avait promis pendant sa campagne, nous attendons qu'il tienne parole.

Tf : Voilà bientôt douze ans que vos jumelles, Isa et Léa, sont nées de mère porteuse en Californie. Comment se portent-elles ?

S. M. : Elles vont très bien, elles sont aimées et en pleine forme. Même si elles sont affectées par ce problème d'état civil. Elles sont en cinquième et comprennent parfaitement le problème. Nous ne leur avons jamais menti sur les conditions de leur naissance, elles connaissent la femme qui les a portées et cela ne les a jamais perturbées. En revanche les décisions de justice qui tombent tous les deux ans comme un couperet leur rappellent à chaque fois qu'on ne reconnaît pas leur filiation, c'est assez lourd à gérer. 

Tf : Au quotidien quelles sont les difficultés auxquelles vous devez faire face ?

S. M. : Cela pose beaucoup de petits et de gros problèmes. Pour la Sécurité sociale, la crèche puis l'école, on nous demandait sans arrêter le Livret de famille, sur lequel elles ne figurent pas puisque la filiation entre elles et nous n'est pas reconnue en France. Nous avons fini par y arriver en fournissant les actes de naissances étrangers traduits en français. C'est logique puisque la sécurité sociale et l'école sont des droits et il n'y a aucune raison pour qu'elles n'en bénéficient pas comme les autres enfants. Lorsque nous voyageons, leur position est très compliquée puisqu'elles entrent en France avec des passeports américains. Ici mes filles vivent dans l'illégalité. Et même si elles obtenaient la nationalité française, elles n'auraient toujours pas la filiation. Si nous décédions, nous ne savons pas ce qu'elles deviendraient. Administrativement cette situation est bancale, et en France une centaine d'autres familles sont dans la même situation.

Tf : Où en est la procédure actuellement ?

S. M. : Etant donné que nous avons épuisé tous les recours juridiques en France, nous avons saisi la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour deux motifs : le droit à constituer une famille et la discrimination à l'égard des enfants. Notre demande a été jugée recevable, ce qui est déjà un bon signal. Nous attendons d'obtenir une date d'audience. Nous voulons que la CEDH reconnaisse les droits de nos enfants.

Tf : Dans le cadre de la prochaine discussion sur l'ouverture du mariage, de l'adoption et de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples homosexuels, la parentalité est au cœur des débats en ce moment. Que vous inspirent ces discussions ?

S. M. : Ce débat a le mérite de mettre la question de la parenté au premier plan. Mais la gestation pour autrui est utilisée comme un repoussoir, un bouc émissaire. Il faut dissocier le débat sur l'homoparentalité et celui sur l'accès des couples hétérosexuels infertiles à la parenté. Dans notre association (C.L.A.R.A.), nous défendons les droits de couples hétérosexuels qui ont une incapacité à faire des enfants par eux-mêmes. C'est la société qui décide ce que signifie « être parent ». Nous, nous voulons que le projet parental, l'intention d'être parent, soit reconnu dans le cadre de la gestation pour autrui comme c'est le cas dans l'adoption. La GPA se fonde sur le même engagement des parents d'intention, qui, même s'ils ne sont pas les parents biologiques stricto-sensu, aiment, élèvent et apportent aux enfants ce dont ils ont besoin. Voilà la définition de la parenté qui devrait être reconnue.

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