Contrairement aux Américaines, les femmes françaises vivraient leur grossesse avec liberté et sérénité. La faute à l’ouvrage « What to Expect When You’re Expecting », THE guide US qui traumatisa des générations de mums to be sur le mode : « En levant votre fourchette, posez-vous cette question : cette bouchée fera-t-elle du bien à mon bébé ? » et mises en garde contre les relations sexuelles pendant la grossesse. Interdictions alimentaires ultra strictes, objectif zéro alcool et tabac incontournable, quel que soit son mode de vie, la femme enceinte américaine n’aura d’autre choix que d’entrer du jour au lendemain en religion, quoi que ce brusque changement de rythme puisse engendrer chez elle comme stress.
Question prise de poids, si la future maman française est invitée à respecter les limites du raisonnable, l’américaine est poussée à PROFITER au maximum de cette parenthèse sucrée enchantée… avant un baby-blues alimenté par les kilos amassés. Alors que l’esprit français prône la sérénité au « détriment » de la rigueur, cette « insouciance » serait-elle sans risque ? A priori oui, puisque le taux de mortalité infantile français est inférieur à l’américain de 57% et que le risque de mortalité liée à la grossesse ou à l’accouchement est de 1 sur 6900 en France quand il atteint 1 sur 4800 aux Etats-Unis…
Si, en France, l’objectif principal des parents de nouveaux-nés est de les « régler » pour qu’ils « fassent leurs nuits » avant 3 mois (et la reprise du boulot), les Américains ne connaissent même pas l’expression. Aux Etats-Unis, 46% des bambins se réveillent au cours de la nuit alors que seulement 11% des parents pensent qu’ils ont un problème de sommeil. Résultat ? Au pays de l’oncle Sam, les parents perdraient 6 mois de sommeil au cours des deux premières années de leurs enfants, vivant « à la nuit, la nuit ».
Le secret des Françaises ? L’attente, pierre angulaire de toute une éducation parfois décriée. Lorsque bébé se réveille ou émet des sons, le parent français préférerait en effet lui laisser le temps de se rendormir, sachant qu’une fois sur deux, celui-ci dort en fait déjà, alors que l’Américain se précipitera pour répondre immédiatement à ses moindres désirs. Ainsi, « pour les Français, apprendre à dormir à un nourrisson n’est pas une stratégie de facilité pour parents paresseux. C’est une première leçon fondamentale destinée à enseigner aux enfants à compter sur eux-mêmes et à s’amuser tout seuls », selon l’auteur.
En France, 63% des femmes s’essaieraient à l’allaitement contre 74% aux Etats-Unis. Pire, la « durée » de l’allaitement serait un scoring de bonne mère américaine dans une société encline à la compétition alors que la pression sociale, quasi inexistante en France, laisse le choix aux mamans de nourrir leur bébé comme elles « le sentent » (l’Académie américaine de pédiatrie recommande un allaitement de douze mois). Si, outre-Atlantique, ce comportement est souvent jugé « irresponsable », les chiffres parlent d’eux-mêmes qui indiquent que la France dépasse d’environ six points la moyenne des pays économiquement avancés dans le classement de la santé et de la sécurité établi par l’Unicef. Les États-Unis, eux, sont dix-huit points au-dessous de la moyenne.
« Attends ! » : voilà un mot que les mères françaises prononcent quotidiennement des dizaines de fois mais que les Américaines semblent ne point connaître. Selon Walter Mischel, expert mondial sur l’aptitude des enfants à retarder la satisfaction d’un désir, aux États-Unis, on a « résolument l’impression que les enfants ont de plus en plus de mal à se contrôler ». Pour preuve, le snacking, qui se résume chez nous au goûter, alors qu’aux Etats-Unis, il semble inenvisageable d’organiser une quelconque sortie sans paquets de chips ou de gâteaux planqués dans le sac en cas de crise, de même que les petits Américains sont enclins à aller se servir dans le frigo dès que le besoin ou l’ennui se fait sentir.
La fixation des limites françaises s’opposerait au nouveau modèle d’éducation américain selon lequel l’enfant ne devrait jamais entendre le mot « non » afin qu’il ne risque pas de le redire à ses parents. La porte ouverte à toutes les fenêtres…
On a tendance à l’oublier mais, tout comme celui des femmes, le statut et les droits de l’enfant ont connu une accélération fulgurante ces soixante dernières années. En France, ça n’est qu’à partir des années 60 que l’enfant a été considéré comme un être à part entière. Nombre de baby-boomers n’avaient d’ailleurs pas le droit de parler à table sans qu’un adulte ne les y aient autorisés. Fermement invité à rester « sage comme une image », l’enfant a été « délivré » par Dolto après 68, lorsque la célèbre psychanalyste expliqua au monde éberlué que le nourrisson comprenait dès sa naissance (sic).
Les principes de base de son héritage ? Les enfants sont des êtres rationnels auxquels il est possible d’apprendre comme à des adultes et qu’il est bon de laisser s’exprimer sur leur ressenti face au monde qui les entoure.
Cependant, pour beaucoup, la dérive récente de « l’enfant roi » viendrait d’une (mauvaise) interprétation de ses conseils qui, s’ils prônent l’écoute de l’enfant, n’indiquent nullement que le parent doive lui obéir.
Qu’on se le dise, notre éducation, si souvent remise en cause, serait en réalité la promesse d’un épanouissement certain pour l’enfant français, si bien élevé face à son voisin américain. Quant à sa (si parfaite) maman, elle continuerait à accorder une grande importance à son couple, trouvant également son équilibre dans un accomplissement professionnel facilité, il est vrai, par son congé maternité couvert par la Sécurité sociale et ses vingt et un jours de vacances supplémentaires par an.
Qui a dit que la mère parfaite n’existait pas ?