Pascale Ribes : L’assistance sexuelle consiste à prodiguer une attention sensuelle, érotique voire sexuelle à une personne en situation de handicap, incapable d’accomplir seule les gestes nécessaires. Il s’agit de personnes n’ayant accès ni à leur corps ni à celui d’autrui. Cela peut aussi bien concerner une personne lourdement handicapée ou un couple dont les deux membres ont besoin d’une aide extérieure pour être allongés l’un à côté de l’autre ou mettre la main de l’un sur le corps du partenaire.
Bien sûr, l’assistance sexuelle n’est pas la panacée mais ce doit être une possibilité pour les personnes handicapées, si elle est librement consentie. Cette activité doit faire partie d’un maillage de réponses dont l’objectif est d’aider ces personnes à se reconnecter avec leur propre corps et de leur permettre d’expérimenter la sexualité.
P. R. : Je trouve cette décision navrante, rétrograde et très moralisatrice pour les pays qui autorisent cette activité. C’est un avis décalé par rapport à notre époque, sans aucune nuance et dans le cliché le plus total. Le Comité ne reconnaît la dimension fondamentale de la sexualité que dans le cadre d’un couple normé. Il concède le fait que les personnes lourdement handicapées sont prisonnières de leur corps, mais ne leur propose rien d’autre que de rester dans leur frustration. Pour faire face à cet état, le CCNE suggère de mieux former le personnel médico-social et de développer l’accessibilité. Mais dans quel but ?
P. R. : L’assistance sexuelle est souvent assimilée à la prostitution ou au proxénétisme, mais c’est un faux débat. Selon sa définition, la prostitution est le fait de se livrer à des actes de nature sexuelle contre rémunération. Certes, l’assistance sexuelle entre dans ce cadre, mais il s’agit là d’une définition juridique, donc très large, qui ne rend pas compte des réalités quotidiennes. Quoi qu’il en soit, la prostitution n’est pas interdite en France, contrairement au proxénétisme, c’est-à-dire à la mise en relation entre un travailleur du sexe et son client. C’est justement la raison pour laquelle nous demandons qu’une exception à la loi soit faite.
P. R. : Nous avons adressé cette lettre à François Hollande pour lui rappeler ses promesses. En avril dernier, en pleine campagne présidentielle, il s’était déclaré prêt à ouvrir le débat sur l’assistance sexuelle pour les personnes en situation de handicap, dans une interview au magazine « Faire Face ». Après avoir été renvoyés vers la ministre de la Santé puis vers la ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti, nous avons été réorientés par le Président lui-même vers Marisol Touraine.
Nous avons donc bon espoir d’être reçus cette fois-ci afin de demander le lancement d’un débat public avec toutes les parties prenantes. Nous souhaitons également la création de services d’accompagnement à la vie affective et sexuelle impliquant la formation pour le personnel, l’aide à la formulation de la demande et la mise en relation pour les personnes handicapées. Le service que nous imaginons serait bien sûr encadré et les pratiques supervisées afin d’éviter les dérives. Ce cadre favoriserait la déontologie car, bien qu’interdite en France, l’assistance sexuelle se pratique sous le manteau.