Au début, leur histoire ressemble à toutes les histoires d'amour. Une alchimie, quelques malentendus et puis un emménagement ensemble. Un bonheur sans nuage pour le couple jusqu'à ce qu'en se touchant machinalement la poitrine, Alice Detollenaere découvre une "boule dure" dans l'un de ses seins.
Au fil des examens médicaux, la jeune femme découvre qu'elle a un cancer du sein. Dans son livre, Guérie par ton amour, publié en octobre aux éditions Leduc, elle dévoile son parcours, son couple, son combat contre cette maladie, mais aussi ce qui l'a poussée à prendre la parole, à assumer cette maladie, d'abord auprès de ses proches puis du grand public. Un cheminement partagé par de nombreuses personnes lorsqu'ils apprennent souffrir d'une maladie.
Avant d'en faire elle-même l'expérience, Alice Detollenaere avait déjà connu le cancer. Elle a perdu sa tante maternelle, puis son père de cette maladie. Deux deuils qui marquent durablement sa famille et notamment la mère d'Alice Detollenaere. La question du silence sur la maladie se pose déjà. "Quand ma tante Ghislaine avait succombé à un cancer du sein, écrit-elle, une chape de plomb s'était abattue sur la famille. Nous n'en parlions jamais de crainte de la déranger dans sa quiétude, voire de bafouer sa mémoire."
Après le décès de son père, victime d'un cancer généralisé, elle impulse une autre dynamique. "Je ne voulais pas que ce déni collectif se reproduise. Alors, nous n'avons jamais cessé de parler de notre père." Quand la maladie la touche à son tour, la question de parler de la maladie se pose autrement. Il s'agit désormais non pas seulement de digérer la nouvelle mais aussi de l'annoncer autour d'elle. En règle générale, les malades ont besoin de temps pour ce faire.
Alice Detollenaere raconte au fil des pages combien elle a eu elle aussi du mal à accepter cette maladie. Au départ, elle s'est même entêtée à poursuivre sa vie, à honorer ses engagements professionnels coûte que coûte. Une équation difficile quand, pour une personne comme elle qui est mannequin, le corps est le principal outil de travail.
Il ne s'agissait pas seulement de garder le silence dans sa vie professionnelle, mais aussi familiale. "Je me suis enfermée dans le silence", écrit-elle pour parler de sa volonté de ne pas en parler à ses proches. "Il m'a fallu des semaines pour avouer à ma famille ce qui était en train de m'arriver."
Mais, à propos de ce silence, elle précise encore : "Mon mutisme n'avait rien d'héroïque, ce n'était pas un acte de bienveillance. C'était un choix égoïste. J'ai fait de mon cancer un tabou pour me préserver moi-même. Je ne suis pas une exception: tant de familles choisissent de se taire." Finalement, elle en parle d'abord à l'une de ses soeurs, puis édulcore un peu les choses pour sa mère avant d'en parler plus largement.
Se l'avouer, en parler à ses proches, c'est une chose. L'assumer publiquement en est une autre. Alice Detollenaere est mannequin, elle partage aussi la vie d'un homme célèbre, le nageur Camille Lacourt. Sa voix a de la portée et la jeune femme en est consciente.
Une de ses amies, qui a elle aussi vécu un cancer, la pousse à parler. C'est la dernière étape, assumer son cancer sur les réseaux sociaux. "Si je ne parle pas de ma situation publiquement, c'est parce que je ne veux pas être stigmatisée. Moi je suis le cliché de la pin-up en maillot de bain, pas celui de la femme à qui on a retiré un sein. Naïvement j'ai pensé qu'en taisant ce chapitre de mon existence je pourrais revenir à ma vie d'avant comme si de rien n'était. C'est un leurre. Rien ne sera plus comme avant. Et à y réfléchir, ce serait même un déni de le croire."
Ainsi, le lendemain de son opération, la jeune femme prend la décision de partager un message sur les réseaux sociaux. Un "coming out", selon ses termes, qui est aussi celui de son compagnon. "En me libérant, je le libère", assure-t-elle.