C'est l'affaire qui tombe mal pour Tisséo. Alors que la régie des transports toulousains a lancé en grande pompe la semaine dernière une grande campagne pour lutter contre le harcèlement sexiste et sexuel dans les transports, une adolescente a été victime d'un exhibitionniste vendredi dernier sans que personne, pas même le chauffeur du bus dans lequel se trouvait l'individu, ne daigne lui venir en aide.
Les faits se sont déroulés l'après-midi du vendredi 9 mars. Rentrant du lycée, Éva, 16 ans, prend place dans un bus de la ligne 1. En face d'elle, un homme visiblement éméché qui amuse la galerie "en jouant à pierre-feuille-ciseau", raconte Éva à France Info. Lorsque l'homme la repère, il se met à lui faire des avances. "Je lui explique que je ne suis pas intéressée. Je prends le bus, je ne veux pas me faire draguer, je veux qu'on me laisse tranquille", explique Éva à la rédaction du JT de France 3. La jeune fille doit alors essuyer ses "blagues sexistes" sous le regard amusé des autres passagers. "Il me dit : 'Tu es une jolie fille, mais sans le visage. Non, je rigole'", puis "commence à chercher un truc dans son jean. Il sort une boîte, puis une bouteille de son slip et commence à défaire quelques boutons de sa braguette."
Éva décide alors, comme le suggère la campagne d'affichage de Tisséo, d'alerter le chauffeur de bus du comportement inapproprié de l'homme. "Je lui raconte et il me dit qu'une femme est déjà venue se plaindre car l'homme l'avait insultée", explique Éva, à qui le chauffeur rétorque : "Je ne peux rien faire. Je ne peux pas quitter ma place." Éva lui demande alors le numéro de téléphone de Tisséo pour qu'un agent fasse sortir l'individu du bus. Mais le chauffeur ne l'a pas. C'est finalement elle, la victime, qui finit par sortir en pleurs du bus. Non son harceleur.
De retour chez elle, Éva raconte à sa mère les faits qui viennent de se dérouler. Stéphanie Lamy décide alors de contacter Tisséo. "J'ai appelé le numéro qui figure sur Twitter. J'ai eu quelqu'un, mais on a été coupé au bout de 25 minutes. Personne ne m'a rappelée. On m'a dit de remplir un formulaire. Tout est fait pour décourager, dénonce Stéphanie Lamy. Comptant porter plainte, la mère d'Éva a dénoncé sur Twitter l'inaction de Tisséo et le manque de formation de ses agents aux cas de harcèlement et d'agression sexuelle. La régie des transports toulousains "dit de prévenir les agents, mais ne précise pas quelles sont les suites. Peut-être qu'ils auraient réagi si les harceleurs avaient été des monstres ?", se demande Stéphanie Lamy, faisant référence à la campagne décriée de Tisséo, qui assimile les harceleurs à des monstres et non à des "messieurs tout-le-monde".
Face à l'ampleur prise par la polémique sur les réseaux sociaux, Tisséo est sorti de son silence et indiqué qu'une enquête interne avait été ouverte. "Qui dit enquête dit que chacun puisse expliquer ce qui s'est passé. Le sujet est trop grave pour qu'on en tire des conclusions hâtives. Evidemment, l'objectif est que l'on comprenne [ce qui s'est passé]", a déclaré à France 3 le responsable des exploitations Tisséo Romain de Montbel.
Samedi après-midi, le premier adjoint à la mairie de Toulouse en charge des déplacement Jean-Michel Lattes, a déclaré s'être saisi du dossier. "L'attitude de ce chauffeur est totalement contraire aux formations qu'il a reçues. Le directeur suit personnellement ce dossier et vous serez – bien sûr – informée des suites qui seront données."
De son côté, la maman d'Éva, Stéphanie Lamy, a indiqué qu'elle rencontrait Tisséo mardi 13 mars après-midi et qu'elle avait porté plainte. "Et si l'enquête interne ne nous satisfait pas, nous continuerons la mobilisation avec l'aide de collectifs féministes."