« Mademoiselle » : un mot pas aussi anodin que l’on pourrait penser. C’est du moins ce qu’estiment les membres d'Osez le féminisme ! et les Chiennes de garde qui mènent la bataille pour éradiquer cette expression. Leur cible : la case « mademoiselle » qui figure dans les formulaires administratifs et que les femmes célibataires doivent cocher. Elles lancent ainsi une campagne aujourd'hui pour demander la suppression de cette appellation. Selon elles, cette distinction entre madame et mademoiselle est l’un de ces « sexismes ordinaires », que rencontrent les femmes dans leur quotidien. En effet, derrière cette question « madame ou mademoiselle ? », les associations engagées dans la campagne voient un usage du langage qui n’a pas évolué, et cantonne toujours la femme à son statut matrimonial. « On ne demande pas aux hommes de préciser s’ils sont mariés ou non, et dans tous les cas on les appelle monsieur », s’exclame Marie-Josèphe Mathieu, corédactrice de l’ouvrage « Femme, j’écris ton nom », guide d’aide à la féminisation des noms de métiers. Cette dernière estime que ce « mademoiselle » est intrusif. « Je milite pour la parité dans tous les domaines et donc pour un traitement égal qui obéit à la même règle pour les hommes et les femmes, souligne Mme Mathieu. La féminité n’existe pas dans le code civil, tout cela résulte de l’usage ». Elle rappelle ainsi que les Allemands sont en passe de supprimer l’expression « Fraülein », même pour les petites filles. Et à ceux qui trouveraient étrange d’appeler une enfant « madame », elle répond qu’il s’agit d’une question « d’habitude ».
« Un combat d’arrière-garde »
Reste que toutes les associations ne soutiennent pas cette campagne. Ainsi Olivia Cattan, présidente de l’association Paroles de femmes, reste réservée sur la pertinence de cette mobilisation. « Nous sommes aujourd’hui en pleine campagne contre le viol et contre les violences faites aux femmes, nous tachons d’aider les femmes qui subissent la crise et qui font face à la précarité et recevons tous les jours des femmes victimes de discrimination, indique-t-elle. Face à ces problématiques quotidiennes que vivent les femmes en difficulté, mener une campagne de cette nature nous paraît un peu dérisoire ». Olivia Cattan souligne en effet le décalage entre l’urgence des actions à mener auprès des femmes et une revendication sémantique « d’arrière-garde ». « Même si sur le fond je suis d’accord avec le fait que le terme « mademoiselle » soit rétrograde et qu’il puisse être important de faire évoluer le vocabulaire, sur la forme je suis loin d’être convaincue ». Elle dénonce ainsi une campagne de communication qui ressemble plus à une posture « bobo » qu’à un combat. « Je crains que les femmes victimes de sexisme qui voient cette mobilisation des associations féministes sur ce sujet ne se sentent oubliées », conclut-elle. Pour Brigitte Grésy, auteure du « Petit traité contre le sexisme ordinaire » (Ed. Albin Michel), même si cela reste « moins important que les écarts de salaire (entre les sexes), les violences ou les difficultés d'accès à l'avortement », cette question n'est pas un détail car « le langage reflète la réalité du monde ». Mme Mathieu, quant à elle, estime que dans tous les cas, le mot « madame » apporte une simplicité appréciable dans les rapports homme femme.
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