"Si tu te fais violer, faudra pas te plaindre, sale pute." C'est le genre de harcèlement que subissent les femmes qui témoignent via le compte Instagram @disbonjoursalepute.
Créé vendredi 10 juillet par l'instagrammeuse Emanouela, suivie par plus de 16 500 abonné·e·s et connue pour défendre les droits des femmes, le compte regroupe trois jours plus tard plus de 8 000 followers. Son objectif : "que les gens comprennent qu'on se prend des insultes extrêmement violentes et que c'est quelque chose qu'on doit vraiment mettre en lumière", confie l'influenceuse au HuffPost.
La jeune femme, victime d'une tentative de viol dans un parking souterrain en 2012, mais aussi d'un harcèlement banalisé constant dans la rue, partage une nouvelle approche de drague lourde qu'elle a subie dans une gare alors qu'elle portait une jupe. "J'ai reçu plus de 200 messages sur mon compte perso, avec des femmes qui ont subi des situations similaires. Elles voulaient témoigner mais sous couvert d'anonymat, par peur de représailles. Et je me suis dit :'putain, mais c'est pas possible de vivre constamment dans la peur', et j'ai décidé de créer ce compte."
Le nom, volontairement violent et fort, est symbolique. "C'est comme ça qu'on nous traite régulièrement dans la rue, et ça concerne toutes les femmes, qu'elles soient mineures ou adultes, fines ou rondes."
Emanouela propose aux internautes de lui envoyer leurs témoignages par messages privés, et de les publier anonymement sur le compte. L'effet est immédiat : elle reçoit plus de 2000 messages en trois jours seulement.
"Il s'agit d'expériences variées, plus ou moins graves, plus ou moins traumatisantes. Je pense que c'est important de mettre en lumière autant la banalisation de la drague hyper lourde que nous les femmes on a habitude de subir, mais aussi des gens qui témoignent de choses dont elles n'ont jamais parlé à leurs familles."
Et les témoignages sont nombreux. Une jeune femme, enceinte de six mois, se fait accoster par un homme en voiture. Après lui avoir indiqué son refus à plusieurs reprises en lui indiquant son ventre rebondi, "il m'a traité (sic) de grosse pute en hurlant à quel point mon enfant aurait une vie de merde."
"Elle ne m'a pas crue"
D'autres se rappellent des faits qui datent d'une semaine, d'un mois, ou même de plusieurs années, mais qui les ont marquées. À 13 ans, un homme en camionnette blanche demande le chemin à une collégienne. Alors qu'elle le lui indique, il lui demande : "as-tu déjà eu un orgasme ?" en se masturbant. La jeune fille, traumatisée, se confie à sa prof principale. "Elle ne m'a pas crue et m'a pénalisée pour mon retard. Je n'en ai parlé à personne d'autre, trop honteuse."
Et elle n'est pas la seule à ne pas être soutenue. "Un jour, une dame a dit en passant à côté de moi : et après elle (sic) viennent se plaindre pour viol. J'étais en short t-shirt fluo." "Mais où est le soutien entre femmes? Où est la sororité ?!", déplore Emanouela.
Et ces témoignages peuvent être difficiles à lire. "J'ai du mal à garder mon calme, car je vois des choses ultra-violentes."