La question du genre est très souvent mise en avant et pas toujours de façon positive. Les stéréotypes de notre société judéo-chrétienne sont persistants :
- Ce ne sont pas de vraies femmes ou de vrais hommes
- Ils sont certainement dérangés
- J'ai rien contre mais je ne veux pas de ça chez moi
- Ils font ça juste pour le sexe
La liste pourrait malheureusement être très longue. Lorsqu'une personne "change" de genre, elle tente juste de mettre son corps en adéquation avec son genre ressenti très souvent depuis l'enfance. Si elle y parvient après un parcours du combattant de plusieurs années, elle ressentira souvent les premières stigmatisations de la famille, des collègues, de l'employeur.
J'ai malheureusement trop d'exemples de parents qui rejettent leurs enfants, cela fait partie des "on ne veut pas de ça chez nous". Des associations viennent au secours de nombreux jeunes qui ne peuvent plus vivre dans ce corps qui ne leur convient pas. Malheureusement, les deux tiers des jeunes trans ont un jour pensé au suicide, et le passage à l'acte est cinq fois plus élevé que les personnes cisgenres.
Au travail, comment annoncer à un collègue que l'on souhaite "devenir" une femme et venir au travail en robe plutôt qu'en costume ? Quelle serait votre réaction si l'on vous annonçait une telle nouvelle ? Vous vous mettriez à rire ne croyant pas que cela puisse être vrai. A son employeur qui ne connait rien à la question et posera sans doute des questions stupides du genre "Vous irez dans les toilettes des femmes ?".
J'ai eu la chance d'avoir une famille, des collègues et des employeurs formidables à tout point de vue, pas la moindre ombre au tableau venant de leurs parts. Cela sans doute parce que ma "transition" s'est effectuée à l'âge de 53 ans. Mes parents ont compris qu'il ne s'agissait pas d'un caprice, mes employeurs l'ont accepté parce que j'avais fait mes preuves en tant qu'homme. Je dirige une usine de 350 personnes et suis loin d'être naïve, je n'aurais jamais eu ce poste si j'avais postulé en tant que femme transgenre ou en tant que femme tout court !
Il est par contre, des stéréotypes dont on ne parle jamais ou très peu, ceux liés au sexe. Durant toute ma vie d'homme, j'ai vécu avec des femmes. Une relation homosexuelle ne m'intéressait absolument pas, je n'avais surtout pas la moindre attirance pour les hommes. Une fois que la chirurgie ait fait quelques miracles, j'ai petit à petit eu des relations avec des hommes. C'est d'ailleurs assez curieux de pouvoir comparer ses propres performances avec ceux de ses messieurs !
Mais la question se pose, comment rencontrer quelqu'un et que lui dire ?
Le premier reflexe est de se connecter à une application type Tinder et commencer à sélectionner. Viennent ensuite les premières discussions. J'ai très vite compris que si j'annonçais que j'étais une femme trans, la plupart partaient en courant... A ce stade, les stéréotypes sont pas mal non plus :
- Je ne suis pas un homo
- T'as encore ton sexe d'homme ?
- T'es un mec ou une nana ?
- Mais tu as un vagin avec un clito ?
- Tes seins sont en plastique ? Ton sexe aussi ?
J'ai donc décidé de ne plus parler de mon passé, on verra bien... Eh bien, cela se passe merveilleusement bien, le gars est en compagnie d'une femme qui comprend son plaisir et chacun y trouve son compte. Extérieurement, rien ne trahis la femme que je suis devenue, l'homme prend son plaisir, je prends le mien. Lorsque j'en parle après l'acte fatidique, c'est bien accepté dans la majorité des cas.
Cela démontre bien que les stéréotypes de ces hommes sont encore très prononcés. Ils se sentent touchés dans leur virilité, que pourrait-on penser d'eux ? Loin de moi l'idée de vouloir me cacher, mais pour nous, les personnes transgenres, la vérité fait peur et fait fuir. La phrase trouvée sur le net "Ma beauté attire, ma transidentité fait fuir" pend tout son sens. Comment changer ces stéréotypes ? En en parlant... Alors messieurs, un peu d'ouverture d'esprit ne vous ferait pas de mal, ne jugez pas et rappelez-vous, nous sommes des femmes comme les autres...
Par Céline Audebeau
Du masculin au féminin, mon parcours singulier (Editions Kawa).