Le 27 février dernier, paraissait La Guerre Invisible (Éd. Les Arènes & Causette) de Leïla Miñano et Julia Pascual. Deux ans d'enquête ont été nécessaires aux deux journalistes pour dresser un inquiétant état des lieux de la situation des femmes au sein de l'armée française, et dont « La Grande Muette » se serait bien passée. Harcèlement, agressions sexuelles, viols... Combien de femmes ont été contraintes de quitter les rangs de l'armée face à l'omerta ?
Quelques jours après la parution de cette enquête-choc, et deux jours après la Journée internationale des Droits des femmes, une nouvelle affaire rapportée par MétroNews éclabousse un peu plus la réputation de l'armée française : celle d'un sergent du Centre militaire de formation professionnelle (CMPF) de Fontenay-le-Comte (Vendée) qui a filmé à son insu une stagiaire alors qu'elle prenait sa douche.
Elle porte plainte et est stigmatisée
Presque cinq mois après les faits, la jeune femme de vingt-cinq ans, vit encore l'événement comme une « humiliation ». Victime de la loi du silence qui règne dans les rangs de l'armée et qui protège les auteurs d'agressions sexuelles, la stagiaire au restaurant du CMPF a été contrainte à la démission après avoir porté plainte contre le sergent. « On lui a tenu la plume pour qu'elle demande la résiliation de son contrat », raconte son avocat Me Jacques Delacharlerie.
Les faits remontent au 19 novembre dernier. Ce soir-là, la France se qualifie pour la Coupe du monde en battant l'Ukraine 3-0. Le sergent du CMPF, ainsi que ses collègues, célèbrent l'événement. Mais, reconnaît-il lui-même, « enhardi après avoir bu », le sergent filme, après son service, l'une de ses stagiaires d'origine martiniquaise, tandis qu'elle prend sa douche. Lorsqu'elle porte plainte, c'est elle qui est inquiétée, et non le jeune homme, bien que ce dernier ait reconnu avoir glissé son téléphone entre la porte de douche et le sol pour la filmer à son insu.
« L'armée, au lieu de lui offrir une protection, l'a seule stigmatisée au nom d'une conception très douteuse de l'intérêt du service. » Ce lundi 10 mars, le tribunal administratif de Nantes a donné raison à la plaignante en suspendant sa démission forcée de l'armée. On ne sait en revanche pas si le sergent qui l'a filmée sera poursuivi pour harcèlement sexuel.