Peau pâle, lèvres pulpeuses, de grands yeux, en Corée, un tiers des jeunes femmes sont passées par une opération de chirurgie esthétique pour se conformer à ces standards de beauté. C'est aussi la destination mondiale numéro un pour le tourisme de la chirurgie esthétique.
En plus de la chirurgie, les Coréennes subissent de plein fouet une société patriarcale qui les enferme dans des standards de beauté épuisants. La "routine beauté" coréenne a été décrite par Vogue et comporte dix étapes chaque soir, de l'élimination des peau morte, masques, crème pour les yeux à la crème solaire.
Le Guardian qui a enquêté sur le sujet rapporte qu'il leur faut parfois se lever deux heures en avance pour effectuer leur préparation tous les matins.
Mais contre ces diktats, des femmes se rebellent. A travers le mot-clé sur les réseaux sociaux #탈코르셋_인증 (que l'on peut traduire par "échapper au corset"), elles dénoncent des normes qui les enferment et les rendent esclaves de l'apparence. Certaines vont jusqu'à détruire complètement leur nécessaire à maquillage et en publient le résultat sur les réseaux sociaux.
Interrogée par le Guardian, la youtubeuse Cha Ji-won explique qu'elle dépensait en moyenne 77 euros par mois pour ses produits de beauté. Elle passait auparavant beaucoup de temps à regarder des vidéos sur Youtube pour apprendre de nouvelles techniques beauté.
Aujourd'hui, elle a tout envoyé valser, coupé ses cheveux blond platine et abandonné son maquillage : "J'avais l'impression d'être née de nouveau [...] Il y a une limite à l'énergie mentale qu'une personne a chaque jour, et j'avais l'habitude d'en dépenser une si grande partie à m'inquiéter d'être 'jolie'. Maintenant, je profite de ce temps pour lire des livres et faire de l'exercice."
Aujourd'hui, Cha Ji-won a ouvert une chaîne Youtube qui compte plus de 28 000 abonné·es où elle raconte sa visite à un festival dédié aux règles ou sa routine beauté... qui consiste à juste mettre de la crème hydratante sur son visage. Son budget cosmétiques se limite à 3€.
Dans ce mouvement de déconstruction d'un idéal de beauté impossible, l'instagrammeuse militante Park Ji-won se bat contre les idéaux de minceur et dénonce la grossophobie ambiante en Corée du sud. Elle publie de nombreuses photos d'elle sur Instagram et veut rendre leur confiance en elles aux Coréennes qui ne correspondent pas aux "standards".
Interrogée par le Petit Journal Séoul, elle raconte son parcours : "Quand j'étais plus jeune, je pensais comme la plupart des Coréens, c'est-à-dire qu'il faudrait être mince pour être belle. A l'époque, il m'arrivait de penser au suicide car j'entendais des choses telles que : 'Si tu ne fais pas de régime, c'est parce que tu es fainéante' ou 'On ne peut pas réussir quand on est gros'."
Elle a ensuite découvert le mouvement body positive en ligne et sa vie a radicalement changé : "En découvrant ce mouvement, c'est comme si j'avais commencé une nouvelle vie." Son but aujourd'hui ? "Aider les gens qui se font persécuter à cause de leur poids. Je ne veux pas qu'ils se détestent à cause de leur poids."
Elle y évoque également le manque de magasins grandes tailles en Corée.
L'industrie des cosmétiques, ultra-puissante en Corée du sud, qui fait appel à des acteur·trices connu·es et aux chanteur·ses de K-pop pour faire sa promotion, génère presque 9 milliard d'euros de chiffres d'affaires par an. Mais elle commence à s'inquiéter face aux mouvements de résistance qui se lèvent. Son changement de stratégie ? Elle pourrait s'intéresser au marché des cosmétiques pour hommes. Une manière de contourner le problème sans y faire face.