Un sac d'or tatoué sur le bras, l'inscription "Va te faire voir, paie-moi" sur le cou, des initiales énormes sur le visage, un code-barres sur le poignet... Voici un échantillon des tatouages que la police américaine découvre de plus en plus fréquemment sur le corps des prostituées, et qui ont pour but de désigner leur "propriétaire".
La pratique consistant à tatouer une personne comme si c'était du bétail humain date de l'esclavage, mais cette manière ignoble de marquer une personne est en train de revenir à la mode aux États-Unis, où de plus en plus de proxénètes forcent les prostituées qui travaillent pour eux à se faire tatouer un nom, un dessin ou des initiales pour montrer qu'elles leurs appartiennent.
CNN a enquêté sur cette pratique qui se répand dans les grandes villes américaines d'après la police et les associations de lutte contre le traffic humain. "La première fois que j'ai constaté ce phénomène, c'était il y a environ 5 ans. C'est juste une autre manière de contrôler les filles et de passer le message suivant aux autres macs : 'Hey, cet individu m'appartient'", explique à CNN Lillian Carranza, commissaire de police à Los Angeles.
Le plus terrible, c'est que ces jeunes femmes ne se rendent pas compte qu'elle se mettent sous le joug de leur "maquereau" en acceptant de se faire tatouer ainsi : "Elles voient cette pratique sous un angle différent. Elle sont un sentiment d'appartenance, et c'est important pour elles. Elles se sentent protégées car elle appartiennent à un groupe", explique de son côté Lois Lee, qui travaille pour l'association Children of the Night qui tente de donner une deuxième chance à ces jeunes filles.
CNN a suivi le parcours d'une ancienne esclave sexuelle , Jennifer Kempton. Après avoir été violée à l'âge de 12 ans par un copain de son frère, cette dernière est tombée dans la spirale infernale de la prostitution et de la drogue. Après cinq années à faire le tapin et à subir des violences répétées, alors qu'elle venait de se pendre au bout d'une corde pour en finir, elle a finalement décidé de se battre pour changer de vie.
Pour la jeune fille, le fait de maquiller les tatouages qui lui rappelaient constamment sa vie passée et son bourreau fut une étape décisive. "Ce fut libérateur d'enlever son nom et de pouvoir avoir ce que je veux sur mon corps", raconte Jennifer Kempton. A la place, celle-ci s'est fait tatouer une croix avec le mot "Amour" et une référence à un verset de la Bible.
De fil en aiguille, Jennifer Kempton a décidé de lancer Survivor's Ink, une association dont le but est de financer les démarches d'anciennes prostituées afin de recouvrir leurs tatouages par de nouveaux dessins pour reprendre le contrôle de leur corps. En l'espace d'un an, de nombreuses femmes ont pu ainsi rompre avec leur passé aux mains des trafiquants en effaçant les marques que ceux-ci avaient laissées sur leur corps grâce à Survivor's Ink.