Le 22 mars 2016, Shanti De Corte, 17 ans, s'apprête à s'envoler pour un voyage de fin d'études à destination de Rome. Alors qu'elle attend à l'aéroport entourée de près de 90 camarades, un explosif éclate à seulement quelques mètres d'elle.
La jeune fille n'est pas physiquement touchée par cet attentat terroriste mais garde de lourdes séquelles psychologiques. Déjà fragile psychologiquement, Shanti De Corte est hospitalisée en psychiatrie, dans un hôpital de la province d'Anvers où elle a déjà séjourné à plusieurs reprises.
Traumatisée, sous antidépresseurs, elle reçoit jusqu'à 11 médicaments par jour, précise-t-elle sur son mur Facebook, sur lequel elle se confie régulièrement. "Avec tous les médicaments que je prends, je me sens comme un fantôme qui ne ressent plus rien. Il y avait peut-être d'autres solutions que les médicaments".
Shanti De Corte va tenter de se reconstruire. Elle témoigne même dans la presse, pour donner un message d'espoir. Mais une agression sexuelle de la part d'un autre patient, en 2018, lors d'un nouveau séjour en psychiatrie va encore davantage la fragiliser et la jeune femme n'arrivera plus à vivre avec ses souvenirs traumatiques. Elle tentera de mettre fin à ses jours en 2020.
La jeune Flamande envisagera alors le suicide assisté, dépénalisé en Belgique depuis 2002. Elle fait plusieurs demandes d'euthanasie pour "souffrance psychique inaltérable", toutes rejetées. Shanti De Corte finit par se tourner vers Leif, une association qui défend le droit de mourir dans la dignité.
Elle dépose en avril 2022 une nouvelle demande d'euthanasie pour souffrance psychique irrévocable, qui est cette fois validée par deux psychiatres. "La jeune fille était dans une souffrance psychique telle que sa demande a été logiquement acceptée", explique à la RTBF la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie.
Le 7 mai 2022, à 23 ans, Shanti De Corte a donc été euthanasiée, entourée de sa famille. "J'ai ri et j'ai pleuré. Jusqu'au tout dernier jour. J'ai aimé et j'ai eu le droit de ressentir ce qu'était le véritable amour. Je vais maintenant partir en paix. Sachez que vous me manquez déjà", écrit-elle en guise de message d'adieu sur Facebook.
Le parquet d'Anvers aurait ouvert une information judiciaire concernant l'euthanasie de Shanti De Corte. Cependant, contacté par la RTBF, le parquet n'a pas confirmé l'information.
Alors que ce dossier refait surface, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné ce mardi 4 octobre la Belgique pour des "défaillances" dans le contrôle a posteriori des euthanasies pratiquées sur son sol, comme le rapporte Le Figaro.
En France, l'euthanasie n'est toujours pas autorisée. La gauche semble y être favorable : sa légalisation a en effet figuré dans les programmes de nombreux candidats à la présidentielle de 2022 (Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon...). Emmanuel Macron dit quant à lui vouloir s'inspirer du modèle belge et favoriser "l'aide active à mourir", indique RMC, en donnant la possibilité aux patients souffrant d'une maladie grave et incurable d'accéder à l'euthanasie.
Actuellement, c'est la loi Claeys-Leotti qui pose le cadre légal de la fin de vie des malades incurables en France. Elle permet une sédation profonde et continue jusqu'au décès pour des malades en phase terminale et en très grande souffrance, dont le pronostic vital est engagé à court terme. En septembre dernier, le Comité d'éthique a jugé une application de l'euthanasie possible "à certaines conditions strictes". Le président Macron a alors annoncé vouloir constituer une convention citoyenne sur la fin de vie "dès octobre", en vue d'un changement de loi d'ici à la fin 2023.