Le cinéma, Halina Reijn l'a expérimenté devant et derrière la caméra. L'actrice néerlandaise s'est en effet jetée à l'eau cette année en signant un premier film solidement ancré dans l'ère post-#MeToo. Son Instinct suit l'histoire flippante d'une psychologue (incarnée par sa complice Carice van Houten, la Mélisandre de Game of Thrones) confrontée à un délinquant sexuel en période de probation. Un thriller psychologique qu'elle présente aux Arcs Film Festival 2019 en compétition officielle.
Nous avons interrogé Halina Reijn sur sa place de réalisatrice dans une industrie mouvante, ses coups de gueule et ses espoirs.
Halina Reijn : Le fait est que nous vivons dans un monde patriarcal et du coup, la plus des histoires qui ont toujours été racontées le sont à travers les yeux d'un homme blanc. J'ai pu le constater durant mes 24 années sur scène à jouer des rôles comme Ophélie dans Hamlet, Hedda Gabler, Lulu, Catarina dans La mégère apprivoisée de Shakespeare : même s'il s'agissait de premiers rôles, ils n'arrivaient jamais à capter l'identité féminine profonde. C'était toujours une version de la vierge, de la mère et de la putain.
H.R. : Bien sûr, et même des pensées sexistes que j'ai pu avoir. Nous sommes toutes et tous conditionné·es pour penser à partir de la perspective des hommes blancs. Cela prendra beaucoup de temps pour vraiment changer cela. Mais comme c'est excitant de vivre dans une époque où le changement est en train d'arriver !
H.R. : Je pense qu'il y a encore beaucoup de travail à faire, mais nous avons l'immense chance d'avoir beaucoup de femmes à des postes à responsabilités. La directrice de la fondation pour le cinéma était une femme tout comme la directrice de notre principal festival de cinéma néerlandais. Et il y a quelques femmes à des positions importantes dans le milieu télévisuel.
H.R. : Le mouvement #MeToo a changé beaucoup de choses. En tant que comédienne de théâtre, j'ai remarqué que les vieux schémas entre les acteurs et les actrices évoluaient, mais je le vois aussi avec la série que j'ai créée avec mon amie l'actrice Carice van Houten et notre boîte de production Man Up. La série s'appelle Red Light, ça parle de prostitution et de trafic de femmes, et j'ai noté que les hommes qui travaillent dessus commençaient à changer petit à petit leurs habitudes. Je pense que nous vivons une période très excitante et nous pouvons participer au mouvement en intégrant toutes les minorités.
H.R. : Il faudrait que tout le monde soit conscient. Des films comme The Irishman de Scorsese (ou Once Upon a Time in Hollywood de Tarantino) sont - même s'ils sont réalisés par les meilleurs artistes de notre temps - parfaitement inappropriés en 2019 ! Il y a moyen de faire ces films d'une manière à présenter les femmes de façon respectueuse. Le cliché narratif du mec blanc faisant le macho tandis que les femmes restent sexy et silencieuses est dépassé.
"La leçon de piano" de Jane Campion
H.R. : La leçon de piano de Jane Campion, ce qui peut paraître bizarre sachant que le personnage principal ne parle pas.
H.R. : Ma muse Carice van Houten.
H.R. : Ma mère.