C'est un hashtag devenu très populaire sur TikTok : #gymweirdos. Traduisible par "les mecs bizarres de la gym", ce mot-clé est très vite devenu viral. C'est via ce hashtag que des milliers de femmes viennent témoigner du harcèlement sexuel dont elles sont victimes en salles de gym, des commentaires déplacés aux rapprochements peu opportuns (un homme vient s'installer à côté d'une femme alors qu'il y a de la place partout ailleurs, un classique) ou encore tentatives lourdes de drague. Mais comment retranscrire cette réalité ? Simple. Les utilisatrices laissent discrètement leur téléphone enregistrer la scène.
Ainsi, elles témoignent de ce qu'elles subissent quotidiennement entre deux échauffements. "Les femmes ont longtemps été hyper-vigilantes à propos de l'attention masculine non consentie qu'elles subissent dans les salles de sport. Mais avant les smartphones, le sentiment qu'elles étaient observés était plus un sentiment qu'une certitude. Maintenant, attraper les weirdos est devenu un sport sur TikTok", relate le Guardian.
Pratique si partagée par ailleurs que les vidéos postées avec ce mot-clé avoisinent les deux millions de vues. Et on ne ne peut que s'en réjouir de cette riposte, même si les images indignent.
"Quand je me suis fait harceler, la salle de gym était pratiquement vide, il y avait tellement de place mais non, il a choisi ce coin-là. Je dirais que je ressens la chair de poule 15% des fois où je m'entraîne. Un homme peut généralement me regarder pendant un laps de temps inconfortablement long. C'est presque comme s'ils essayaient de vous déshabiller dans leur tête !", explique auprès du Guardian Gina Love, l'une des utilisatrices remarquées sur TikTok pour avoir témoigné en images de cette situation malaisante. "Ce comportement me force à m'entraîner le plus tôt possible, généralement dès l'ouverture de la salle de sport", poursuit-elle.
Gina Love va à la salle au moins quatre fois par semaine. On comprend qu'elle en ait ras-la-casquette. Et elle n'est pas la seule. Selon une enquête réalisée auprès de 1000 personnes sur cette "gym-timidation" , 6 femmes sur 10 se seraient déjà senties harcelées par un homme dans une salle de sport. Et 2 femmes sur 5 ont déjà évité de faire de l'exercice dans une salle de sport parce que les hommes les mettaient mal à l'aise."
Dans ce sondage, "les femmes, les personnes transgenres ou non-binaires ont admis qu'elles évitaient le plus souvent la zone des 'machines de musculation' dans la salle de sport. 28 % des femmes qui fréquentent les salles de sport et qui évitent cette zone invoquent la raison suivante : 'il y a surtout des hommes là-dedans' et 18 % ont admis que les hommes les mettaient mal à l'aise", détaille l'étude.
Les recherches sur les "salles de sport réservées aux femmes" auraient par ailleurs augmenté de 69 %. Parmi les femmes interrogées, 31 % ont déclaré qu'elles verraient un avantage à ce que les salles de sport soient réservées aux femmes afin que celles-ci puissent se sentir plus en sécurité et plus à l'aise. De même, 38 % des femmes verraient un avantage à ce qu'il y ait au moins une section de la salle de sport réservée aux femmes.
L'historienne Natalia Mehlman Petrzela explique au Guardian que la répartition originelle des salles de gym (hommes et femmes étaient séparées) ont engendré en retour un phénomène des décennies durant : "Les femmes qui faisaient de l'exercice étaient considérées comme une sorte de spectacle sexy. Même durant les événements sportifs, les spectateurs masculins étaient davantage là pour mater plutôt que pour encourager les athlètes féminines". Dans les années 80, les salles de gym étaient carrément considérées comme "les nouveaux bars pour les hommes célibataires". On part de loin.
Un "male gaze" que dénoncent aujourd'hui les TikTokeuses.