Les injonctions qui collent à la peau des femmes sont multiples. Leur manière de penser, de travailler, de se comporter, de s'habiller : tout est épié, dicté, critiqué. Mais aussi la façon dont elles entretiennent leur corps. Comprendre, dont elles s'épilent.
Depuis que la publicité existe, on nous vend des produits à n'en plus finir pour venir à bout de nos poils corporels. Maillot, aisselles, jambes, cuisses, sourcils, moustache : tout doit y passer au nom de la sacro-saint féminité. Quand les hommes, eux, peuvent pavaner librement avec un moquette en guise de torse et personne ne trouvera rien à redire, ou en tout cas pas la société, certain·e·s y voyant même un symbole de "virilité". Un double standard révoltant, contre lequel les féministes se battent depuis des années.
Pour célébrer le choix de conserver sa pilosité, des mouvements s'organisent, des marques changent de discours. Liberté, Pilosité, Sororité, encourageait en 2019 les concerné.e.s à raconter l'histoire de leurs poils, entre douleur et culpabilisation, sous #1ereFoisEpilation. Le Sens du Poil, un compte Instagram qui exposait des photos de femmes non-épilées afin de lutter contre le fait de "se plier à certaines normes pour plaire". Ou encore le challenge du mois de janvier, #JanuHairy, qui invitait à ne plus se raser pour tordre le coup aux diktats.
Aujourd'hui, c'est au tour de #JeGardeMesPoils de faire parler de lui, et de celles qui ont décidé de ne plus camoufler leur capillarité.
Au fil des posts publié sous le hashtag ce lundi 14 septembre, les internautes accompagnent une photo de leur corps poilu de quelques phrases qui expliquent leur démarche. Généralement, un besoin irrépressible de s'affranchir d'une norme patriarcale.
"Les mecs gardent leurs poils : personne ne dit rien, c'est naturel", entame l'une. "Les femmes s'assument, se montrent avec des poils : ce n'est pas naturel, c'est sale ET on les insulte. Et après vous venez chouiner que les féministes sont misandres ?" Une deuxième rappelle : "Mon corps m'appartient, parce que c'est inadmissible qu'une femme soit harcelée pour les avoir montré, et surtout parce qu'on est pas là pour vous plaire".
D'autres, souhaitent se donner du courage, se livrer : "Ça fait 6 ans que #jegardemespoils car j'utilise mon énergie pour autre chose que les retirer, et je m'en fous", écrit une jeune femme. "Malheureusement je les retire encore parfois car pas la force de répondre aux humiliations publiques déjà vécues, mais il faut que ça cesse !"
Pour l'utilisatrice MlleOriane (qui affirme se raser mais soutenir celles dont le choix diffère), il est indispensable que la saleté ne soit plus associée au refus de s'épiler. "On m'explique où est la crasse dans les poils ?", assène-t-elle. "Les sourcils aussi, c'est crasseux du coup. C'est juste des poils, et... SURPRISE ils ont aussi leur utilité ! Le fait que ça soit crasseux c'est dans vos tête." Sans aucun doute.
Des mots qui font du bien, et qui prouvent que, si la route est encore longue, la sororité et la prise de parole pavent déjà la voie de changements essentiels.