Un sacre. Ce 26 janvier, Billie Eilish est ressortie victorieuse de la dernière cérémonie des Grammy Awards. En recevant quatre prix, dont ceux de la Meilleure artiste émergente et du Meilleur album pour When We All Fall Asleep, Where Do We Go ?, la jeune artiste américaine de 18 ans devient la plus jeune chanteuse couronnée de l'histoire des Grammys. Une belle manière de débuter 2020 pour celle qui, l'an passé, a reçu de nombreuses distinctions à travers le monde - ses chansons étant aussi bien louées par la BBC et la revue musicale Billboard que par le magazine économique Forbes.
Mais alors que s'ouvre une année artistique qui promet d'être riche (la chanteuse et musicienne a été choisie pour composer le thème d'ouverture du prochain James Bond), Billie Eilish a mis en sourdine quelques instants l'éclat de la réussite en se dévoilant sous un jour plus introspectif. Au gré d'une intervention diffusée sur la chaîne américaine CBS, l'artiste est effectivement revenue sur la période la plus sombre de son adolescence : ses tentatives de suicide et sa violente dépression. Un témoignage nécessaire.
"J'étais tellement malheureuse l'année dernière. J'étais si triste, comme dépourvue de joie... Sans vouloir être trop 'dark', je ne pensais vraiment pas que j'arriverais jusqu'à mes 17 ans", a-t-elle ainsi avoué lors de l'émission The Gayle King Grammy Special. Aujourd'hui, Billie Eilish a 18 ans. Et elle ressent le besoin de confesser, le regard tourné vers l'avenir, ce qu'elle a traversé suite au grand retentissement médiatique de ses chansons. A savoir, tel que le relate le magazine Teen Vogue, une très forte dépression. Une période douloureuse, marquée par une grande solitude, mais également des phases d'automutilation et des pensées suicidaires.
Loin, très loin donc de la "success story" idyllique que peuvent fantasmer les médias et le public. Sur CBS, l'interprète de Bad Guy explique notamment avoir pensé à "se faire du mal" dans une chambre d'hôtel à Berlin : "J'étais seule dans mon hôtel, et je me souviens qu'il y avait une fenêtre juste là. Je me rappelle avoir pleuré car je pensais à la façon dont... j'allais mourir", raconte-t-elle. Un mal-être durable, et si compliqué à mettre en mots. "Pouvoir sortir de cette coquille était très libérateur", souffle-t-elle désormais, apaisée par une longue thérapie et le soutien de ses proches.
Chez CBS, elle incite également les millions d'anonymes qui l'écoutent à ne jamais négliger leur santé mentale. "S'il vous plaît, prenez soin de vous et soyez gentil avec vous-même", dit-elle encore. Un message fort à l'adresse de son public de teenagers, qu'on ne peut qu'approuver et relayer.
Quand elle parle, Billie Eilish est bien souvent "entière" et sans filtre. En avril 2019 déjà, elle s'exprimait sur une maladie elle aussi source de préjugés et d'ignorance : le syndrome de Gilles de la Tourette, dont elle est atteinte. "Je n'en ai jamais parlé avant parce que je ne voulais pas que cela me définisse. Mais j'ai réalisé que beaucoup de mes fans étaient aussi atteints du syndrome [de la Tourette], ce qui m'a fait me sentir plus en confiance avec mon public et avec ma maladie. J'ai senti qu'il y avait une connexion avec mes fans quand certains m'ont dit 'moi aussi j'ai toujours vécu avec ça'", expliquait alors la jeune chanteuse sur le plateau de l'iconique Ellen DeGeneres.
L'écouter évoquer sa dépression confère la même sensation : tout en se libérant d'un poids, l'artiste sensibilise les spectatrices et spectateurs ados aux sujets les plus tabous et intimes. Sur CBS, elle explique d'ailleurs rencontrer régulièrement de jeunes fans qui ont vécu les mêmes choses (l'automutilation, les pensées suicidaires) sans forcément oser en parler. Elle les prévient, bienveillante : "Ne faites pas ce "pas" de trop et ne vous blessez pas davantage". Dans les pages de Rolling Stone, elle avouait déjà en juillet dernier avoir souffert de dysmorphie corporelle durant son adolescence. Une parole qui compte.