En Afghanistan, l'épidémie de Covid-19 s'installe. Au 20 avril, les autorités recensaient un peu plus de 1000 cas déclarés - un chiffre qui serait minimisé par manque de tests. Seulement dans ce pays ravagé par la guerre (le 19 avril, une attaque talibane a encore fait 23 morts parmi les forces de sécurité et 9 parmi les civils), les moyens médicaux sont limités. Aujourd'hui, l'Afghanistan dispose de 300 respirateurs pour 35 millions d'habitant·e·s. Dans la ville d'Herat, la capitale de l'Ouest afghan, les respirateurs manquent comme partout et les cas de personnes infectées par le nouveau coronavirus s'accumulent. C'est d'ailleurs là que s'est infiltrée l'épidémie, depuis la frontière iranienne limitrophe. La situation est critique et les solutions peu nombreuses.
Cinq lycéennes de 14 à 17 ans ont donc décidé de travailler avec les moyens du bord pour essayer de soigner un maximum de monde. Surnommées "les rêveuses afghanes" (elles se sont fait connaître en 2017, lorsque leur visa a été refusé alors qu'elles tentaient de participer à un concours de robotique à Washington), elles sont en train de mettre au point un prototype de respirateur confectionné à partir de pièces de moteur et de batterie de voiture. De Toyota Corolla, précisément, le modèle le plus populaire dans cette région. Si le gouvernement valide leur modèle, elles pourraient en produire pour la somme de 300 dollars contre 30 000 dollars pour un appareil classique, et ainsi combler les besoins.
"L'équipe travaille avec des spécialistes de santé locaux, ainsi qu'avec des experts de l'Université de Harvard, afin de produire un prototype basé sur un design de l'Institut de technologie du Massachusetts", précise Roya Mahboob, dirigeante d'une entreprise technologique qui sponsorise l'équipe, à l'AFP. Le but est d'utiliser un système mécanique issu du véhicule pour faire fonction le ballon, "élément central de la machine", affirme l'Agence France Presse. Un procédé minutieux : "Ce qui est compliqué, c'est d'ajuster le timing et la pression de pompage, car chaque patient a besoin d'un volume et d'une pression d'air spécifique, selon son âge ou la sévérité de son état", explique Somaya Farooqi, 17 ans, "capitaine" de l'équipe.
Aux côtés des jeunes femmes, le ministère de la Santé assure que des spécialistes et des ingénieur·e·s sont venu·e·s prêter main forte. "Nous apprécions et encourageons le travail acharné de ces jeunes filles, nos soeurs, pour produire des respirateurs", a ainsi annoncé le porte-parole Wahidullah Mayar.
Une fois la construction achevée, chaque prototype devra être étudié puis approuvé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et par le ministère de la Santé afghan. Ce n'est qu'après cette étape que l'équipe pourra commencer à développer la production. L'idée des "rêveuses afghanes" rejoint d'ailleurs un projet aussi établi par plusieurs ingénieur·e·s de Tesla, constructeur américain de véhicules électriques, qui, début avril, avaient également présenté un respirateur artificiel réalisé à partir de pièces de leurs voitures, rappelle l'AFP. Un concept brillant qui pourrait éviter des pertes tragiques.