La Croatie ne supporte plus l'injustice dont sont victimes les femmes dans le pays. Ce samedi 19 octobre, plusieurs manifestations ont agité le pays suite à la libération de cinq hommes suspectés de viol sur une mineure de 15 ans.
Âgés de 19 à 20 ans, ils sont accusés par la police d'avoir violé à plusieurs reprises et pendant près d'un an une jeune fille de 15 ans originaire de leur village, près de la ville côtière de Zadar, rapporte l'AFP. Ils auraient filmé les agressions avec leurs téléphones portables et auraient ensuite fait chanter la victime, jusqu'à ce que celle-ci parvienne à se confier au psychologue de son école.
D'abord incarcérés, ils ont été libérés la semaine dernière le temps de l'enquête. Une décision qui a retourné le pays et, après une semaine de protestations, les cinq hommes ont a nouveau été incarcérés ce jeudi. Ce qui n'a pas empêché les Croates de se rassembler ce samedi, pour dénoncer un système judiciaire qui ne protège aujourd'hui pas suffisamment les femmes.
"La Croatie ne s'occupe pas efficacement des violences faites aux femmes, ni de celle du viol. Même les données officielles du pays montrent que la police et les tribunaux reconnaissent rarement les actes de violence contre les femmes comme des actes criminels", explique dans les colonnes de The Independent Jelena Zadar, chercheuse pour Amnesty International. Car en matière de violences sexuelles, la Croatie distingue le 'viol' d'une 'relation sexuelle sans consentement'. Si le premier chef d'accusation peut ouvrir à une peine de 10 ans de prison, le second prévoit un emprisonnement de 6 mois à 5 ans seulement.
"Ces dernières années, la plupart des viols conjugaux et autres viols ont été poursuivis en justice pour 'relations sexuelles sans consentement' et les agresseurs ont été condamnés à une peine de 6 mois ou moins" poursuit Jelena Zadar. Elle ajoute : "Plus de 90% des cas de viol entraînent généralement des peines d'un an ou moins et, dans certains cas, les auteurs sont libérés plus tôt pour bonne conduite."
Une situation que les Croates ne supportent plus. Ce samedi, dans la capitale croate à Zagreb, 7 000 personnes se sont réunies pour faire entendre leur voix. "Nous sommes ici parce que le système a de nouveau laissé tomber l'une de nous. Les institutions et nous-mêmes avons échoué en tant que société. Nous ne pouvons nous contenter de parler de la violence contre les femmes juste quand de tragiques événements comme celui-ci font les gros titres", a scandé l'une des organisatrices du mouvement à la foule, relayée par l'AFP.
Un appel que semble avoir entendu Kolinda Grabar-Kitarovic, la présidente croate, qui tweetait le 14 octobre: "Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la violence de notre société, cela insulte encore davantage les victimes." Celle-ci appelle la société et les institutions judiciaires à redoubler de vigilance en matière de violences sexuelles.
Selon la police croate, relayée par France 24, il y aurait chaque année dans le pays entre 90 et 150 viols ou tentatives de viols. Un chiffre bien en-dessous de la réalité selon le média, puisque seule une victime sur 20 oserait rapporter son agression aux autorités.