Ce sont des images que l'on oublie pas. Elles sont de ces séquences qui sont venues marquer au fer rouge l'année 2019. Souvenez-vous. Au Chili, en novembre dernier, des dizaines de citoyennes ont manifesté dans la rue afin de dénoncer les violences sexuelles, la recrudescence des féminicides, l'inaction des autorités "compétentes" et l'impunité des agresseurs. Un bandeau sur les yeux, main dans la main, leurs voix ont résonné à l'unisson. Elles ont entonné ces chants : "Le patriarcat est un juge qui nous reproche d'être nées". "Notre punition, c'est les féminicides". "C'est le viol" . "Et le coupable ce n'était pas moi, ni où j'étais, ni comment je m'habillais...".
Une mobilisation qui fait frisonner tant elle secoue les piliers de la société patriarcale, et en impose par l'éloquence de ses slogans - très fédérateurs. Mais aujourd'hui, cette militance s'est vue quelque peu "salie". Quatre joueurs du Club América, l'équipe de football mexicaine professionnelle, ont effectivement cru bon de parodier cette performance féministe initiée par le collectif LasTesis. Un acte déplacé qui n'a pas été sans conséquences...
Il faut dire que ce détournement n'était pas du meilleur goût, loin de là. C'est sous la forme d'une chanson de vestiaire, enregistrée en vidéo, que quelques uns des joueurs du Club America ont effectivement repris l'hymne de révolte des femmes Chiliennes. Simplement vêtus d'un short et de chaussettes, torses-nus, entre deux matchs, les sportifs ont imité, tout sourire, la chorégraphie sororale des activistes du collectif LasTesis. Ou comment détourner une charge à l'encontre des "violeurs" (désignés comme étant l'état, les forces policières, le gouvernement) à grands coups de moqueries beaufs... Difficile de voir là un hommage de la part des sportifs mexicains.
Une farce méprisante qui n'a pas manqué de faire réagir, jusqu'aux plus hauts rangs. Le 17 décembre dernier, la Fédération mexicaine de football s'est ouvertement exprimée sur ce "bad buzz", l'espace d'un communiqué officiel relayé sur ses réseaux sociaux. Elle considère cette "parodie" sexiste comme un "manque de respect" envers les femmes Chiliennes. Et fustige le fait d'avoir délibérément "tourné en dérision" leur manifestation, comme l'indique encore le journal France Football. La Fédération nationale voit là une atteinte au Code de la déontologie. Et a donc affligé aux joueurs mexicains incriminés un match de suspension et une amende.
Ledit Code exclue et réprime "tout acte discriminatoire fondé sur le sexe, la race, les opinions politiques, la classe sociale, la situation économique". Autant dire que ce pastiche indécent transgresse ces exigences morales. Le joueur du Club America responsable de la diffusion de la vidéo, a quant lui exprimé ses regrets. Il s'est excusé auprès des "femmes du Mexique" pour son attitude, comme l'explique le journal L'équipe.
Les porte-paroles du Club America pointent eux aussi du doigt le comportement indigne des footballeurs, contraire aux "valeurs du club", peut-on lire dans ce communiqué officiel relayé sur les réseaux sociaux. Et le Club de préférer au terme de "parodie" une formulation plus adéquate : "violence sexiste". On ne saurait mieux dire.