C'est une nouvelle qui suscite l'indignation du côté des militantes féministes. L'élu LREM Damien Abad a été nommé ministre des solidarités au sein du nouveau gouvernement, en dépit d'un signalement pour des faits présumés de viols. Deux femmes, Chloé, 41 ans, et Margaux, 35 ans, évoquent au site d'investigation Médiapart des faits présumés qui remonteraient à 2010 et 2011.
Ces accusations visant l'ex porte-parole de François Fillon durant la campagne présidentielle de 2017 ont également été adressées à l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique au début du mois de mai. "Il est attendu des élu·e·s de la République de faire montre d'exemplarité en toutes circonstances. La libération de la parole des femmes ne suffit pas à mettre un terme aux situations abusives", s'est exprimée l'une des accusatrices, Chloé, auprès de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique.
"J'ai mis plusieurs mois à réaliser et admettre que ce qui s'était passé était un viol. Parler n'est ni courageux ni héroïque, c'est une responsabilité. Aujourd'hui, il faut que ce type de comportement s'arrête, que la culture qui permet cela s'arrête", affirme encore la jeune femme et accusatrice à Médiapart.
A Médiapart, Chloé, qui raconte avoir l'habitude dans le cadre de son travail d'échanger avec des responsables politiques, détaille avoir rencontré Damien Abad le 7 août 2010, au mariage d'amis communs, et l'avoir trouvé "sympathique mais un peu insistant". L'élu lui aurait par la suite proposé de prendre des verres. Elle aurait finalement accepté un rendez-vous dans un bar du IXe arrondissement. "Ensuite, c'est le black out. Chloé dit s'être réveillée avec Damien Abad dans une chambre d'hôtel proche du bar, en sous-vêtements, en état de choc et de dégoût profond, avec le sentiment d'avoir pu être droguée", avance le site d'investigation.
Chloé évoque également "un corps courbaturé et douloureux, comme s'il s'était passé quelque chose de pas normal". Elle aurait ensuite revu le ministre en février 2011 à Lyon lors d'un moment qu'elle dit "plein de non-dits et de gêne", puis lors d'un rendez-vous professionnel à l'Assemblée nationale en septembre 2012. Damien l'aurait cependant relancé régulièrement sur Messenger pour lui proposer de prendre un verre.
Margaux, ex-militante centriste de 35 ans, aurait quant à elle déposé plainte pour viol en 2017 contre le député (une enquête classée sans suite). Alors vice-présidente des Jeunes démocrates à Paris, Margaux aurait rencontré Damien Abad en 2009 lors d'une réunion politique. Ce dernier aurait commencé "à la draguer par SMS", par textos "insistants", lui demandant par exemple "une photo de son décolleté". Margaux aurait fini par accepter une rencontre, qui aurait abouti "à une relation sexuelle empreinte d'irrespect, d'injonction et d'insistance", à laquelle elle aurait plusieurs fois essayé de mettre fin.
"Il a continué. J'étais hébétée qu'il ne puisse pas tenir compte de mon refus. Je lui ai dit qu'il se voyait dans un film porno. Il m'a dit d'être gentille et il continuait", poursuit-elle à Médiapart en détaillant les faits. Auprès du site d'investigation, Damien Abad dément de son côté les faits rapportés et évoque "une tentative évidente de déstabilisation à un moment clé de [son] parcours politique", se disant "révolté par les accusations calomnieuses rapportées" et contestant "tout abus de [sa] position hiérarchique".
Il ajoute cependant qu'il lui est arrivé "d'envoyer des messages, parfois intimes, parfois tardifs". "J'apprends qu'ils ont pu troubler ou gêner. Je ne peux que le regretter. Le fait d'avoir pu, par des messages, heurter sans le vouloir certaines personnes m'affecte", conclut-il encore auprès du site d'investigation.
"Bien évidemment je n'étais pas au courant. Il ne peut y avoir aucune impunité sur tous ces sujets d'agression sexuelle. Il faut continuer à agir pour que les victimes puissent libérer leur parole et être bien accueillies pour déposer plainte. Si la justice est de nouveau saisie on tirera toutes les conséquences de cette décision", a de son côté commenté la Première ministre Elisabeth Borne auprès du média BFM TV.
"Nous n'avons pas de commentaire à faire à ce sujet, la Première ministre a été très claire", ont quant à eux réagi les ministres Gérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti auprès du média d'informations.